aux aventuriers du xvie siècle. Les pays non frayés sont ceux que le climat rend, pour ainsi dire, inhabitables. Plus de ces grandes luttes où une poignée d’Européens bravaient fièrement une population entière. Dans sa marche de plusieurs mois, le capitaine Back ne rencontre que des bandes d’Indiens affamés, implorant l’assistance des voyageurs comme les mendians de nos grandes routes, et plus loin une tribu d’Esquimaux, dont l’instinct défiant se tait à la vue de quelques verroteries. Un passage du voyageur donne raison, plutôt que les rigueurs du froid et la pauvreté du sol, de cette misère qui aura bientôt dévoré toutes ces peuplades abruties. « Ces grossiers enfans de la nature, dit le capitaine Back, une fois rassasiés et vêtus, ne connaissent plus ni jouissances ni émotions : la pitié est chez eux une sensation purement animale, disparaissant avec la présence de l’objet qui la cause ; le but avoué ou secret de leurs actes n’est, à mon avis, que l’intérêt personnel. » Le lugubre aspect d’une nature désolée, fidèlement saisi par l’auteur anglais, la traduction facile et intelligente de M. Cazeaux, les notes scientifiques qui suivent le journal de route, recommandent le livre du capitaine Back aux lecteurs qui préfèrent l’exactitude des faits et l’instruction solide aux mensonges brillans de l’imagination.
iii. Histoire ancienne. — L’attention plus ou moins bienveillante des érudits se porte sur les travaux paléographiques dont le succès renouvellerait pour nous l’aspect de l’antiquité. M. Salvolini procède à l’œuvre de vérification que nous avons annoncée, en publiant une Analyse grammaticale et raisonnée des anciens textes égyptiens. La première partie offre le texte et l’interprétation de la célèbre pierre de Rosette. La méthode analytique de M. Salvolini est déterminée par l’hypothèse de Champollion. Il s’applique d’abord à désigner l’objet dont le hiéroglyphe n’est souvent qu’une représentation imparfaite ; secondement, à chercher si cet objet fonctionne dans le discours, en qualité d’image, de symbole ou de lettre phonétique ; enfin lorsqu’un rôle est assigné à chaque caractère, l’auteur cherche à établir une phrase en langue copte, dont il discute les lois et les altérations probables. On voit que chaque figure exige une longue série de dissertations. Les juges compétens ne se sont pas encore prononcés sur un travail immense qui n’est connu que par une première livraison. Il est probable qu’à cette heure, tous les érudits de l’Europe répètent les expériences de M. Salvolini, mais silencieusement, et sagement prémunis contre les illusions dont les annales scientifiques offrent tant d’exemples ! C’est qu’en matière de philologie, ils sont de temps en temps rappelés à la circonspection. On n’a pas oublié la récente histoire des neuf livres de Sanchuniaton, qui mit en émoi toutes les universités de l’Allemagne, et dont l’Analyse obtint chez nous les honneurs de la traduction. On sait