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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.
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30 avril 1837.



La marche des affaires, la situation du trône vis-à-vis de la chambre, et celle de la chambre vis-à-vis du trône, la direction de l’opinion publique, ont-elles subi quelque changement depuis la modification du dernier ministère, et depuis la retraite de M. Guizot ? C’est là le véritable point de vue d’où il convient de juger le nouveau cabinet. Un simple coup d’œil sur sa situation suffira pour répondre à toutes les vaines déclamations qu’on a pris à tâche de substituer, depuis quelque temps, à la saine et calme discussion des affaires. Il est à remarquer que cet excès de bile et d’humeur signale toujours la présence d’un certain parti au pouvoir. La force, qui donne d’ordinaire du calme et de la sérénité à ceux qui l’acquièrent, ne fait, au contraire, qu’accroître l’irritabilité et l’impatience de ce parti. On sent que l’instrument est trop lourd dans sa main, et qu’il le secoue, par de vains efforts, avec colère, dans l’impossibilité où il se trouve de le manier dignement. Et, comme il faut bien justifier ces tracasseries et ces violences, on met d’accord sa logique et son humeur, en montrant la royauté jetée comme sur une mer mouvante et exposée à tous les orages. On dirait, à entendre les organes de ce parti, que le trône de juillet a été apporté sur notre sol par une invasion étrangère, et que le roi qui l’occupe, se trouve avoir à lutter contre toute une nation armée contre lui. La violence et la rigueur, voilà les bases sur lesquelles ils voudraient fonder tout le système du gouvernement. Hors de là, il n’y a que lâcheté, que faiblesse, que des périls sans nombre et une chute prochaine. Le ministère, selon eux, doit être un tribunal qui juge toujours sur la présomption de culpabilité, guilty, comme on dit dans la jurisprudence anglaise. Il n’y aurait d’élus, dans ce sombre système, qu’un petit nombre d’esprits bilieux et ardens ; ceux-là se trouvent seuls exceptés, et doivent, en quelque sorte, faire le métier de commandeurs, armés du fouet et du bâton. Puis, pour bien assurer l’exécution de ce système, il faut la confier au ministre qui est, comme dit M. Fonfrède, l’expression la plus nerveuse des mœurs monarchiques de la France ! Dans cette royauté utopique, conçue