Page:Revue des Deux Mondes - 1836 - tome 8.djvu/583

Cette page a été validée par deux contributeurs.
579
LITTÉRATURE ORIENTALE.

Zoroastre ne fut pas complètement anéantie. Un certain nombre de ses sectateurs demeura dans le Kirman ; un autre se porta, cent ans après l’invasion musulmane, à Ormus sur le golfe Persique, puis, après diverses tentatives d’établissement, finit par se réfugier sur la côte occidentale de l’Inde, dans le Guzurat. Là vit encore un débris de l’ancienne religion de Zoroastre ; là, les Parsis ou Guèbres ont conservé sa loi et son culte, à travers toutes les révolutions de l’Inde, durant mille ans, depuis le viiie siècle jusqu’à nos jours.

Avec les temps, les Parsis de l’Inde avaient perdu les livres de Zoroastre. Ces livres leur furent rendus à la fin du xive siècle par un destour, ou prêtre, qui les leur apporta de la Perse, où ils s’étaient conservés.

Le texte original, écrit en langue zende dans l’ancien idiome de la Perse et de Zoroastre, était accompagné d’une traduction en langue pelvie. Le pelvi n’est encore qu’imparfaitement connu ; on sait seulement que, dans cette langue, les élémens sémitiques abondent, c’est-à-dire des élémens qui appartiennent à une toute autre famille de langues que le zend et le sanscrit, à la famille de l’hébreu et de l’arabe. Le pelvi paraît avoir succédé en Perse au zend, et précédé le persan moderne.

Aujourd’hui les Parsis de l’Inde entendent beaucoup mieux le pelvi que le zend, et c’est dans la traduction pelvie qu’ils étudient en général les livres de Zoroastre, originairement écrits en zend. Ce qu’ils en ont conservé ne constitue, selon eux, que la vingtième partie de la totalité primitive ; ce sont plusieurs fragmens principalement liturgiques ; c’est un lambeau de l’ancien rituel persan.

Si nous possédons cette partie des ouvrages attribués à Zoroastre, nous le devons, comme je l’ai dit, au courage et à la persévérance admirable d’un Français qui eut l’héroïsme de la science. On ne peut, en parlant de Zoroastre, refuser quelques lignes à celui qui, au péril de sa vie, a mis la France en possession de ce monument et de cette langue, dont, avec une autre sorte de courage non moins rare, M. E. Burnouf a entrepris de pénétrer et d’éclaircir le mystère.

En 1754, un jeune homme de vingt-deux ans, sans fortune, sans autre ambition que celle du savoir, conçut la pensée d’aller