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unanime dans le conseil de Ferdinand VII, tentèrent de profiter de l’occurrence terrible où Madrid se trouvait jetée pour offrir à tous les intérêts une large transaction. Ils reçurent à cet égard des engagemens qu’on sembla tenir jusqu’à l’instant où l’on se sentit assez fort pour les enfreindre. Mais lorsqu’au palais on se crut en mesure de contenir la ville et de triompher des efforts mal combinés des milices, lorsque des nouvelles apocryphes eurent annoncé plusieurs insurrections royalistes dans l’armée, on cessa soudain de ménager ceux qui, après avoir été si long-temps nécessaires, n’apparaissaient plus que comme des obstacles. Le ministère se vit prisonnier dans cette royale demeure pour la sûreté de laquelle il avait si souvent combattu. Mais voici que la chance tourne, que Morillo, désabusé de négociations fallacieuses, attaque avec désespoir la révolte qu’il ménagea jusqu’alors ; que les gardes, sans direction et sans chef, se compromettent par de fausses manœuvres ; voici qu’on les traque et qu’on les fusille comme des bêtes fauves, et que les portes du palais sont forcées. Alors on est aux pieds de ceux qu’on emprisonnait naguère ; on les embrasse humblement pour obtenir une protection qu’il n’est plus en leur pouvoir de dispenser. Il faut désormais se livrer sans réserve au vainqueur, se livrer à lui en ayant perdu ce qui console l’honnête homme tombé en faisant son devoir.

On sait le résultat de toutes les résistances avortées. Le parti exalté se saisit du pouvoir ; une enquête fut commencée contre les membres du ministère, et l’homme principal du nouveau cabinet fut Evariste San-Miguel, le chef d’état-major de Riego. Le parti communero s’empara de toutes les positions importantes, recomposa tout le personnel du palais et des diverses administrations, et le ministère puisa dans son union temporaire avec la majorité des comtés, et surtout dans la dispersion de l’armée de la foi, récemment opérée par Mina, une certaine force pour contenir les entraînemens de l’assemblée et le mouvement populaire du dehors.

Mais la question étrangère venait désormais compliquer celles de l’intérieur, au point de les effacer complètement. Pour quiconque n’était pas dénué de coup d’œil, il était évident que la journée du 7 juillet, où le parti des deux chambres avait maladroitement joué ses chances, avait décidé de la guerre, et qu’un échange plus ou moins long de notes diplomatiques ne la rendait pas moins inévitable. La médiation anglaise ne pouvait la prévenir, car on rejetait avec hauteur à Madrid ce qui devait en former la base, la promesse de modifier le pacte de 1812 ; et la coopération active de la Grande-Bretagne ne pouvait être un objet de préoccupations sérieuses, car elle eût été le signal d’une ligue continentale, que M. Canning ne pouvait songer à provoquer. L’intervention de 1823