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LES RÉPUBLIQUES MEXICAINES.

leur taille, laquelle n’excède pas quatre pieds et demi. La cocarde est de la largeur d’une assiette ; le ceinturon qui supporte le sabre, a bien six pouces de largeur, de sorte qu’il couvre toute la poitrine de ces petits hommes. Le col de la chemise, dépassant la cravatte de plusieurs pouces, s’avance en pointes fort en avant du menton. En regardant de près, on découvre sur leur petite figure basanée une trentaine de poils disséminés sous le nez, et qui forment moustaches. Ils laissent croître leurs cheveux derrière la tête, à la manière de nos séminaristes. Leur uniforme est chargé d’or prodigué avec le plus mauvais goût ; rien de plus grotesquement bouffon que de les voir défiler dans leur embarrassant équipage, faisant des efforts incroyables pour marcher au pas.

Il n’y a parmi les officiers ni tenue, ni discipline, ni respect des convenances, ni maintien de grade et de rang ; ainsi, un lieutenant s’en va, dans un cabaret, frapper sur l’épaule de son colonel, et s’enivrer avec lui. Un de ces derniers avouait qu’il n’avait jamais pu venir à bout de faire aller ses officiers à la manœuvre. En effet, leur état est ce dont ils s’occupent le moins ; et comme leur service se borne à très peu de chose, ils passent leur temps dans des maisons de jeu et de débauche. Un capitaine joua un jour sa solde qu’il venait de recevoir, il la perdit ; il joua ensuite les galons de son pantalon ; la chance lui ayant été contraire, il joua et perdit ses épaulettes ! Telles sont les occupations ordinaires de ces messieurs, depuis le général jusqu’au sergent. Leur solde étant très inexactement payée, les senores oficiales ont souvent la bourse plate ; mais il est des moyens de se tirer d’affaire : ainsi, le commandant déserte avec la caisse du régiment, le capitaine avec l’argent de sa compagnie, le sergent avec le prêt de son escouade ; il n’est pas jusqu’à l’humble caporal qui n’ait aussi sa petite industrie ; il fait de légers emprunts aux soldats, et quand ceux-ci réclament ce qu’ils ont prêté, il ne manque pas de bonnes ou mauvaises raisons pour se dispenser de payer ; s’ils insistent, il les menace de les faire déchirer de coups de verges à la première faute qu’ils feront, et ce moyen est toujours efficace. Quant aux généraux, ils spéculent plus en grand, et se vendent à quelque parti en armes. C’est ainsi que, dans la révolution de 1832, le général Valencia qui commandait un corps des troupes du gouvernement, ayant fait au jeu des pertes considérables, et se trouvant dans un grand embarras pé-