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condamnées à mort, et le bûcher où l’on brûlait les sorciers. Les assemblées de Thingvalla commençaient ordinairement au mois de juillet et duraient quelques semaines. Les deux chefs de l’althing occupaient une petite maison en pierre dont on voit encore les vestiges ; les autres campaient sous des tentes. Pendant le temps de la république, les présidens de l’assemblée étaient les langmand élus par le peuple. Plus tard, quand l’Islande fut réunie au Danemarck, le gouverneur nommé par le roi s’empara successivement de leurs différentes attributions, et il ne leur resta plus que le caractère d’homme de loi et leur droit de juridiction. Les comices de l’althing ont duré huit siècles. Elles ont passé tour à tour par le paganisme Scandinave et le christianisme, par la ferveur catholique des premiers temps et la réformation, par la république et la monarchie. Une ordonnance du roi de Danemarck les a supprimées en 1800. Le tribunal supérieur, le gouverneur, l’évêque, sont aujourd’hui à Reykiavik.

C’est dans le fond d’une coulée de lave, entre les masses gigantesques de rochers que se tenaient les séances de l’althing. À voir ce vallon étroit, isolé au milieu des montagnes, resserré par ces lourdes murailles de pierre, on dirait que la nature avait disposé ce lieu exprès pour les orageuses assemblées d’un peuple de pirates et de guerriers. Lorsqu’on arrive à Thingvalla, par la route de Laxelv, on descend dans ce vallon comme dans un abîme, par une pente tortueuse, par un sentier rompu qui ressemble à un lit de torrent. À droite, les rochers s’inclinent vers le lac, comme s’ils suivaient encore la pente que leur imprimait le volcan enflammé ; à gauche, ils s’élèvent comme de hauts remparts, et se dessinent à l’horizon sous les formes les plus étranges. D’un côté, le vallon est fermé par ce chemin où l’on n’avance qu’avec peine, de l’autre par une cascade. Tout autour on n’aperçoit que des montagnes rouges, une plaine semée de quelques arbustes chétifs, un grand lac, et au bord du lac la pauvre église de Thingvalla. Le soir, quand tout ce paysage est éclairé par les doux reflets d’une lumière argentée, quand tout est calme, et qu’on n’entend que la chute de l’eau, et le léger frôlement de quelques touffes de mousses chassées par le vent, c’est l’un des lieux les plus romantiques qu’il soit possible de voir, et si, au milieu de cette solitude profonde, on se représente les grandes réunions d’autrefois, les tentes blanches dressées dans ce vallon, les juges assis sur les blocs de lave, les chefs de chaque cohorte marchant sous leur bannière, et le peuple dispersé à travers les rochers, je ne sache pas de tableau plus digne d’occuper le pinceau du peintre, et la plume de l’historien et du romancier.

Tandis que nous étions campés sous notre tente au milieu du vallon, nous vîmes venir à nous un homme dont l’extérieur et les vêtemens por-