Page:Revue des Deux Mondes - 1836 - tome 7.djvu/673

Cette page a été validée par deux contributeurs.
669
SUR L’ABUS DES ADJECTIFS.

qu’il n’avait pas eu de gratification cette année, et ne lui en sûmes pas mauvais gré. Après les premières civilités, le dialogue suivant eut lieu entre nous, permettez-moi de vous le transcrire le plus brièvement possible :

MOI.

Monsieur, je vous prie de m’expliquer ce que c’est que le romantisme. Est-ce le mépris des unités établies par Aristote, et respectées par les auteurs français ?

LE CLERC.

Assurément. Nous nous soucions bien d’Aristote ! faut-il qu’un pédant de collége, mort il y a deux ou trois mille ans…

COTONET.

Comment le romantisme serait-il le mépris des unités, puisque le romantisme s’applique à mille autres choses qu’aux pièces de théâtre ?

LE CLERC.

C’est vrai ; le mépris des unités n’est rien ; pure bagatelle ! nous ne nous y arrêtons pas.

MOI.

En ce cas, serait-ce l’alliance du comique et du tragique ?

LE CLERC.

Vous l’avez dit ; c’est cela même ; vous l’avez nommé par son nom.

COTONET.

Monsieur, il y a long-temps qu’Aristote est mort, mais il y a tout aussi long-temps qu’il existe des ouvrages où le comique est allié au tragique. D’ailleurs Ossian, votre Homère nouveau, est sérieux d’un bout à l’autre ; il n’y a, ma foi, pas de quoi rire. Pourquoi l’appelez-vous donc romantique ? Homère est beaucoup plus romantique que lui.

LE CLERC.

C’est juste ; je vous prie de m’excuser ; le romantisme est bien autre chose.

MOI.

Serait-ce l’imitation ou l’inspiration de certaines littératures étrangères, ou, pour m’expliquer en un seul mot, serait-ce tout, hors les Grecs et les Romains ?