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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.
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31 août 1836.



Le ministère du 22 février n’existe plus. Après avoir résisté aux épreuves de la session, il a succombé, en dehors du mouvement parlementaire, dans une question de politique extérieure, grave sans doute, mais qui ne paraissait pas devoir amener la dissolution d’un cabinet formé sous les auspices de la chambre, et véritable expression de la majorité. Cette crise ministérielle a été, plus long-temps que toutes les autres, ignorée du public et renfermée dans le secret du conseil. La dissolution du cabinet aurait même brusquement éclaté, sans que l’opinion eût trouvé le temps de s’y préparer, si le jour même où les démissions furent données pour la première fois, il n’était survenu dans l’après-midi une dépêche télégraphique qui faisait une loi de suspendre l’effet des résolutions déjà prises. Cette dépêche annonçait qu’à la suite d’une révolution militaire, la reine régente d’Espagne avait reconnu à Saint-Ildefonse la constitution de 1812. — La reine était-elle prisonnière ? Ses jours étaient-ils menacés ? Quel parti prendrait son ministère, qui délibérait à Madrid sur ce grave évènement ? Essaierait-il, avec les troupes encore fidèles, de réduire l’insurrection de la Granja, et de ramener les deux reines dans la capitale, où le désarmement de la garde nationale s’opérait sans trop de difficulté ? Si la constitution de 1812 est proclamée à Madrid, quel en sera l’effet sur le ministère de M. Isturitz, sur les cortès émanées des dernières élections, sur la régente elle-même, en un mot, sur tout un ordre de choses qui avait pour unique base le testament de Ferdinand VII ? — Telles furent les principales questions qu’on se fit aussitôt, et tout le monde comprit qu’il fallait au moins attendre quelques jours. Cependant, quoique les ministres démissionnaires, ou qui étaient dans l’intention de se retirer, eussent fait cette concession de bonne grâce, il était dès-lors à peu près certain qu’on ne parviendrait pas à s’entendre sur le fond des choses, et que ce provisoire chancelant ne serait pas de longue durée.

La question sur laquelle s’est divisé le cabinet était celle de la politique à suivre vis-à-vis de l’Espagne. Ce n’était pas, à proprement parler, la question de l’intervention, mais celle des mesures à prendre pour relever, par un secours efficace, le moral ébranlé de l’armée espagnole ; celle de la coopération. Plusieurs fois déjà elle avait occupé non-seulement le