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et choisirent pour cette mission les hommes non mariés ; car plusieurs d’entre eux avaient épousé des filles du pays. Après beaucoup de fatigues et de dangers, les envoyés arrivèrent enfin dans la mère-patrie, et élevèrent, sur le lieu même d’où ils étaient partis, un temple en l’honneur de Mélicerte. « Ce temple, on le voit encore dans l’ancienne ville des Tyriens. » La ville de Tyr elle-même fut bâtie plus tard sur ce même emplacement.
Dans le dernier chapitre de ce livre, l’auteur décrit les statues du dieu et les fêtes que célébraient en son honneur, un jour avant leur départ, ceux qui s’embarquaient pour Tartessus.

Certes il serait difficile de donner une couleur plus naturelle à ce symbole si intéressant des progrès de la navigation et du commerce des Phéniciens. Il n’y a pas moins de vérité dans le récit du voyage de découvertes que le roi de Tyr, Joram ou Hiram, contemporain de Salomon, fit exécuter par sa flotte, qui parvint jusque dans l’île de Ceylan :

Les Éthiopiens[1] apprirent à Joram que vers le midi il y avait aussi de vastes et riches contrées ; que la population y était immense ; les productions variées et remarquables ; qu’elles consistaient en or, en argent, en perles, en pierres précieuses, en bois d’ébène, en ivoire, en singes, perroquets, paons, etc. ; que toutes ces productions se trouvaient dans la Chersonèse la plus éloignée vers l’orient, là où les hommes voyaient le soleil sortir des ondes de la mer.
Joram envoya alors une députation à Natambalos, roi de Babylone, et lui fit dire : « J’apprends que le pays des Éthiopiens est vaste et populeux, et que de Babylone on peut y arriver facilement, mais non pas de Tyr. Si tu consens à fournir à mes sujets les vaisseaux nécessaires pour ce voyage, je t’enverrai cent manteaux de pourpre. » Le roi se montra d’abord disposé à y consentir ; mais il retira sa promesse quand les marchands éthiopiens qui se trouvaient à Babylone, amenés par le commerce, l’eurent menacé d’abandonner la ville, s’il donnait des vaisseaux aux Tyriens.
Alors Joram offrit au roi des Juifs, Irenius (Salomon), de lui fournir tous les bois nécessaires pour la construction d’un nouveau palais s’il consentait à lui céder un port sur la mer d’Éthiopie, et Irenius lui abandonna la ville et le port d’Éilotha (Élath).
Bien qu’il y eût dans le voisinage de ce lieu d’immenses forêts de pal-
  1. Il s’agit de trois jongleurs indiens qui avaient long-temps vécu à la cour du roi de Sidon. M. Grotefend pense que par Éthiopiens il faut entendre les habitans de Ceylan.