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ce n’est tous les bardes, au moins un certain nombre d’entre eux ; ces bardes, dont l’emploi primitif était d’enseigner la puissance des dieux, de donner l’immortalité aux braves, ou de prophétiser l’avenir.

Possidonius dit encore : « Quand les chefs vont en guerre, ils mènent avec eux une suite de gens qu’on appelle parasites. Ces gens, qui mangent à la table de leur patron, chantent ses louanges, non-seulement au peuple qui se rassemble autour d’eux, mais encore à tous ceux qui veulent bien les entendre en particulier. » Voilà une véritable dépendance personnelle, une sorte de domesticité, de vassalité, à laquelle sont réduits ces bardes attachés à la personne du chef.

On voit donc que les chefs gaulois avaient des bardes attachés à leur personne, les suivant partout, enflammant leur valeur pendant le combat, et la célébrant après.

C’est ainsi que les rois Scandinaves avaient leurs scaldes attitrés. Saint-Olaf en plaça quatre autour de lui avant la bataille de Sticlarstadt, afin, leur dit-il, qu’ils vissent de près ce qu’ils auraient à chanter. Il en était de même des rois de la Grèce dans les temps héroïques. Agamemnon laissa son poète auprès de Clytemnestre, et ce ne fut qu’après avoir tué le chantre divin qu’Égiste parvint à séduire la reine d’Argos. Il était le poète d’Ulysse, ce Phémius que les prétendans forçaient à chanter dans leurs festins insolens, et, qui, au souvenir de son maître, interrompait ses chants par des larmes. Enfin, le barde avait une place déterminée, et pour ainsi dire un rang officiel dans la hiérarchie domestique de la petite cour des rois du pays de Galles et d’Irlande.

C’est aux bardes de ces deux pays et à ceux de l’Écosse que nous allons nous adresser pour compléter les données insuffisantes que les anciens nous ont laissées sur les bardes gaulois.

Nous commencerons par celle de ces contrées qui est la plus voisine de notre patrie, par le pays de Galles ou Cambrie. C’est là que le bardisme s’est le mieux développé, s’est le plus complètement organisé, et s’est conservé le plus long-temps.

On trouve le bardisme établi de temps immémorial dans la Grande-Bretagne. Selon les traditions galloises, l’inventeur du chant, de la musique, est aussi le fondateur du bardisme ; c’est un personnage purement mythologique, père de la muse, et nommé