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tions des souverainetés, telles que les entendait la sainte-alliance. L’école diplomatique du congrès de Vienne avait une prédilection marquée pour ces assemblées européennes dans lesquelles les hommes d’état se réunissaient pour régler les grandes affaires du continent. Ce goût des congrès se rencontre également chez M. de Talleyrand, chez le prince de Metternich et chez le comte de Nesselrode. L’empereur Alexandre les recherchait aussi, parce qu’on l’y consultait comme arbitre souverain ; il aimait qu’on s’en rapportât à sa générosité et à son expérience. M. de Nesselrode accompagna le czar dans les réunions de Troppau et de Laybach, Ceux qui ont approché l’empereur Alexandre à cette époque, remarquèrent qu’il était dans une sorte d’incertitude entre les idées libérales et les tendances fortement répressives de l’Autriche. M. de Metternich consacra toute son habileté à convaincre l’empereur des dangers qui menaçaient les souverainetés européennes, si on ne se décidait à un de ces grands mouvemens militaires qui en finissent avec les rébellions. C’est alors qu’à point nommé arriva au comte de Nesselrode la nouvelle d’un mouvement séditieux qui s’était manifesté dans un régiment de la garde à Saint-Pétersbourg. Cette nouvelle changea brusquement les dispositions de l’empereur ; M. de Nesselrode reçut ordre d’entrer corps et ame dans le mouvement autrichien.

Ce qu’il faut bien remarquer, c’est que dans cette lutte entre le principe libéral et le principe absolutiste, Capo d’Istria était demeuré le fidèle interprète d’une pensée indépendante pour la Grèce. Le malheur voulut que le mouvement insurrectionnel des Hellènes se mêlât à la révolte du Piémont, à la proclamation de la constitution des cortès ; on ne put pas toujours exactement déterminer la différence qui existait entre un mouvement militaire désordonné, qui effrayait les gouvernemens réguliers, et ce magnifique spectacle de la Grèce, vierge morte, comme dit Byron, qui arborait la croix sur ses drapeaux déchirés. Capo d’Istria fut disgracié pour son amour de la Grèce. Triste ingratitude des révolutions ! c’est ce même Capo d’Istria que le poignard d’un Hellène frappa au cœur.

Dès-lors s’opère la fusion intime de la politique russe et de la diplomatie autrichienne ; c’est l’absolu triomphe du prince de Metternich. Cette situation se prolonge au congrès de Vérone. M. de Nesselrode était alors ministre unique, chef de la chancellerie sous