celui des Hautes-Alpes n’en comprend que 386, la Corse 305, les Hautes-Pyrénées 494, et la Lozère 588. Cette différence n’est nullement proportionnée à celle de la population ; car le département du Nord, par exemple, qui a 6,452 électeurs sur 989,938 habitans, renferme un électeur pour 153 habitans ; pendant que le département du Doubs, qui a 1041 électeurs sur 265,535 habitans, ne donne qu’un électeur pour 255 habitans ; le département de l’Indre a 1092 électeurs sur 245,289 habitans, ou un électeur pour 224 habitans, et le département limitrophe, l’Indre-et-Loire, qui réunit 2,128 électeurs sur 297,016 habitans, compte un électeur pour 138 habitans. Ainsi le corps électoral, tel qu’il est constitué, prend pour base non la population, mais la richesse ; le nombre des députés est calculé au contraire sur la population, de là une contradiction singulière entre les élémens de l’élection. Une grande partie du corps électoral se trouve neutralisée par l’agglomération même des électeurs ; le nombre des nominations est en raison inverse de la richesse qui confère pourtant le droit de nommer. Le département de la Corse a deux députés ; le département de la Seine n’en a que quatorze, bien qu’il renferme cinquante-trois fois autant d’électeurs. Ainsi les villes, favorisées en apparence, sont en réalité sacrifiées aux campagnes ; les lumières et la richesse à la force du nombre, à la population.
Les électeurs ne se montrent pas généralement très jaloux de leurs droits. Soit négligence, soit crainte d’être appelés aux fonctions de jurés, un grand nombre répugnent à se faire inscrire ; et, à Paris seulement, ce nombre est évalué de 5,000 à 6,000, le tiers du corps électoral. Sous la restauration, c’était l’administration qui contestait les droits des électeurs ; ce sont les électeurs qui abandonnent ces droits aujourd’hui, et, sans le zèle de l’administration qui les inscrit d’office sur les listes, le suffrage tomberait par déshérence aux mains du pouvoir.
En 1824 et en 1827, les dix-sept vingtièmes des électeurs inscrits ont pris part aux opérations électorales ; en 1830, au moment où allait se décider la lutte entre la nation et la dynastie, les neuf dixièmes des électeurs ont voté. Suivant un document cité par M. Jollivet, les trois quarts des inscrits se sont présentés en 1834 aux élections. La proportion exacte est celle-ci : 126,333 votans