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ILLUSTRTATIONS SCIENTIFIQUES.

telle. Mais sa grande activité multipliait les heures, et l’on sait qu’il n’a pas plus négligé les intérêts de sa fortune que ses devoirs.

Voyons maintenant de quel point est parti cet homme remarquable, suivons-le dans les diverses périodes de sa vie, et cherchons par quels moyens il est parvenu à un degré de fortune et de célébrité sans exemple dans les fastes de la médecine.

Guillaume Dupuytren est né à Pierre-Buffière, département de la Haute-Vienne, le 5 octobre 1777 ; mort le 8 février 1835, il a donc vécu cinquante-sept ans et quatre mois.

À l’âge de douze ans, le jeune Dupuytren regardait passer un régiment de cavalerie sur la place de Pierre-Buffière ; un officier de ce régiment, ayant remarqué sur sa jeune physionomie je ne sais quelle expression d’avenir dont il fut frappé, lui proposa de le conduire à Paris. Dupuytren saisit cette offre et n’hésita pas à se lancer dans cette vaste arène, où il a tracé depuis un si large sillon ; son arrivée à Paris date de 1790. Il fut admis au collége de la Marche, rue de la Montagne Sainte-Geneviève, qui avait pour recteur M. Coesnon, frère de l’officier auquel il s’était confié. Quelques années après, il se livrait déjà à l’étude de l’anatomie ; en 1795, M. Husson et lui se réunissaient souvent et passaient des soirées dans sa petite chambre du collége, au cinquième étage, pour étudier ensemble l’ostéologie. On instituait alors l’école de santé (nivôse an iii ou janvier 1795) dont il fut bientôt après nommé prosecteur en même temps que MM. Duméril, Ribes et Lassis. Il quitta son collége et vint prendre un logement tout aussi modeste dans le couvent des cordeliers, transformé depuis en hôpital clinique de la faculté. Ses jeunes camarades le reconnaissaient déjà pour maître, et il les guidait dans leurs dissertations. Il suivait la visite et les brillantes leçons de Corvisart qui le distinguait et l’appelait près de lui pour l’aider aux ouvertures de cadavres ; puis il alla continuer ses études à la Salpêtrière, sous la direction du professeur Pinel, jusqu’à ce qu’enfin sa vocation pour la chirurgie l’attachât à M. Boyer, dont il avait reçu les premières leçons d’anatomie ; une liaison plus intime l’appelait d’ailleurs à la Charité et le fixa dans cet hôpital.

La place de chef des travaux anatomiques, devenue vacante par la mort de M. Fragonard, fut donnée à M. Duméril ; Dupuytren s’était mis sur les rangs, et cet échec l’affligea beaucoup. Mais M. Du-