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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.
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14 mai 1836.


L’attention publique, nous voulons dire l’attention de la chambre et des ministres, s’est portée, pendant cette quinzaine, vers un seul point, le rapport de M. Jaubert sur la demande d’un crédit supplémentaire de 4,580,000, demandé par M. de Montalivet, pour l’achèvement des monumens publics de Paris. On savait avec quelle passion les doctrinaires avaient discuté cette question dans les bureaux de la chambre, et l’on n’ignorait pas que c’était sur ce terrain, qu’ils jugeaient favorable, que devait s’ouvrir la campagne qu’on prépare, dans le quartier-général doctrinaire, contre M. Thiers. Le rapport de M. Jaubert est le manifeste et la déclaration de guerre officielle du parti. Pour nous, spectateurs tranquilles de ce débat, c’est un singulier spectacle que nous donnent là M. Jaubert et ses amis. Les louanges dont ils fêtaient M. Thiers retentissent encore dans la chambre ; l’ardeur avec laquelle ils le défendaient, et particulièrement sur les points où ils l’attaquent aujourd’hui, est encore dans tous les souvenirs, et déjà ils tiennent contre leur héros d’hier un langage plus violent et plus injurieux que celui des ennemis les plus acharnés de M. Thiers. Eh, quoi ! ce qui était louable hier est devenu blâmable aujourd’hui ; ce qu’approuvaient M. Piscatory, M. Aug. Giraud, M. Bussières et M. J. Lefebvre, par l’organe de leur rapporteur, M. Duvergier de Hauranne, n’est plus qu’un sujet de plaintes amères pour ces messieurs depuis que M. Jaubert a été chargé de porter la parole pour eux dans cette question ? Il est vrai que du 20 avril 1835, où M. Duvergier de Hauranne faisait un rapport sur l’emploi du crédit de 100,000,000 affectés aux monumens publics, jusqu’au 6 mai 1836, jour du rapport de M. Jaubert sur l’emploi du même crédit, les choses ont bien changé de face. M. Thiers est ministre, et M. Guizot ne l’est plus.

Du temps de M. de Guizot, comme disent les doctrinaires, c’était parmi eux à qui admirerait le plus la merveilleuse spécialité de M. Thiers pour les questions d’arts et de travaux. Personne ne s’entendait mieux que lui à examiner un devis, à entrer dans tous les détails de la construction et des développemens d’un édifice ; on l’accompagnait dans ses fréquentes visites à la Madeleine, au Panthéon, au bâtiment du quai d’Orsay, dans les ateliers des peintres et jusque sur les échafaudages aériens