théologique entre le dogme et le sens naturel, la foi était déjà tombée. Il est difficile de s’empêcher de penser que la simplicité fut avant tout le caractère de ces premières époques. Des pêcheurs de Galilée ont, les premiers, prêché le christianisme. Difficilement, le paganisme aurait-il été fondé par des docteurs.
Quoi qu’il en soit, le vrai sens d’Homère et qui résume tout le reste, est d’avoir été l’expression de l’unité du peuple grec. Toutes ces tribus hostiles les unes aux autres, différentes de mœurs, de cultes, d’institutions, se rapprochèrent, sous la protection de ce grand nom d’Homère. Jamais des chants épars, sans ordonnance et sans plan, eussent-ils produit rien qui ressemblât à cet effet ? Si la poésie eût été abandonnée à toutes les chances de la diversité des peuples et des tribus, au lieu de la sagesse et de l’harmonie que l’antiquité admirait dans les œuvres de son poète, ne serait-ce pas plutôt le désordre et les incompatibilités politiques des états grecs qui s’y feraient sentir ? On aurait des rhapsodies doriennes, ioniennes ; l’aristocratie heurterait la démocratie. On aurait une poésie de contraste. On n’aurait pas la poésie d’Homère. Chez ces peuples épars, il fallait un Moïse païen qui ramenât le chaos à l’unité. Homère fut, après Orphée, le Moïse du monde grec. L’Iliade et l’Odyssée furent sa Genèse et son Deutéronome. Tout un peuple d’artistes reçut à son berceau la Bible de l’art, non point écrite sur le rocher de Sinaï, au milieu des éclats de la foudre, mais gravée dans la mémoire des hommes, au son de la cythare de Smyrne. Les peuples grecs peuvent désormais s’engager à leur aise dans leurs luttes intestines. Leur lien de famille ne sera plus brisé. Tous, ils portent dans leur souvenir une même et ineffaçable loi d’harmonie et de beauté. Lentement ils vont chanter et épeler le livre du vieux rhapsode ; lentement aussi, un autre peuple dans les montagnes de Judée, va psalmodier sous son dattier l’Homère du Sinaï. Plus tard, quand leur éducation sera achevée, ils se rencontreront l’un et l’autre à Éphèse, dans l’auditoire de saint Paul.
Les poèmes d’Homère ont été donnés à l’enfance de la Grèce pour qu’elle les feuilletât, en souriant, sur ses gradins d’albâtre, comme un livre fait de gravures et d’images coloriées ; car l’éducation de ce peuple s’est faite dans la joie et non pas dans les larmes. Il était le dernier né du dieu antique. Il a été caressé de la main du Jacob olympien, comme son dernier fruit et son Benja-