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DIPLOMATES EUROPÉENS.

qu’elle entrait dans l’alliance de la Russie et de la Prusse avec le désir pourtant d’arriver à la paix générale.

Il faut se faire une juste idée de la position où se plaçait alors l’Autriche : elle s’était faite médiatrice entre les alliés et Napoléon ; elle avait voulu la paix sur des bases avantageuses pour elle, et capables de lui faire reconquérir la puissance qu’elle avait perdue. Cette paix, elle la désirait encore, mais en échangeant son caractère de neutre contre celui de belligérant, parce qu’elle y trouvait son profit, et l’espérance d’un meilleur lot dans les chances du combat. C’est ce qu’exprime à peu près le manifeste de l’Autriche, ouvrage de M. de Metternich. C’est dans ce sens qu’il négocia depuis la rupture de Prague jusqu’au congrès de Châtillon, Après la rupture, M. de Caulaincourt demeure auprès de M. de Metternich, renouvelle ses propositions ; M. de Metternich répond « qu’il est prêt à traiter, si l’on veut admettre l’indépendance de la confédération germanique et de la Suisse, et reconstituer la Prusse sur une vaste échelle. » Napoléon résiste encore ; il s’adresse à M. de Bubna, persuadé qu’il pourra exercer une influence heureuse sur l’empereur, son beau-père. Le 14, il accepte les propositions du cabinet autrichien ; sa réponse est portée à Prague. Il était trop tard, et M. de Metternich déclara qu’il était impossible désormais de traiter séparément, et qu’il fallait en référer à l’empereur Alexandre ; la coalition était entière et consommée.

Le 15 août, les hostilités recommencent sur toute la ligne. Napoléon n’a pas perdu tout espoir d’entraîner l’Autriche dans les intérêts de la France ; il propose de négocier pendant la guerre ; M. de Metternich, répond qu’il va porter à la connaissance des alliés les propositions de la France ; mais pendant ce temps les armées autrichiennes s’ébranlent. C’était chose immense que l’adhésion de l’Autriche à la coalition ; deux cent mille Autrichiens débouchaient de la Bohême, et pouvaient tourner la ligne de l’armée française. Rappellerons-nous ici les prodiges de Dresde et la triste défaite de Leipsick ? À la fin de 1813, la ligne de l’Elbe était perdue, celle du Rhin même compromise ; toute l’Allemagne était debout soulevée et l’Europe entière menaçante. Napoléon seul avait à lutter contre cette formidable invasion.

Pour l’Autriche, la question allait changer de nature sur le Rhin. Tant que Napoléon avait été campé avec ses armées dans l’Allemagne, le plus pressant intérêt, à Vienne, était de secouer cette domination puissante. Mais alors il n’y avait plus ni confédération du Rhin, ni dangers imminens ; le sol était couvert des débris du grand empire, et la Germanie rendue à sa vieille indépendance ; les Français n’y avaient plus que quel-