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apostoliques craignaient que Ferdinand ne vécût trop long-temps ; ils craignaient surtout qu’il ne se remariât encore, afin de tenter une quatrième fois les chances d’une postérité directe.

L’évènement a prouvé que leurs craintes étaient fondées. Les espérances de l’infant et de son parti s’anéantissaient dans les noces de Marie-Christine ; la princesse de Sicile était comme un ange de conciliation envoyé du ciel pour pacifier cette Thébaïde intestine dont les annales d’Espagne offrent d’ailleurs tant d’exemples. Or, ce n’était point le compte du parti, et il accueillit la nouvelle reine avec une colère, une haine qui n’attendait pour éclater qu’une occasion.

Une espérance pourtant lui demeurait : il était peu probable que cette quatrième épreuve réussît plus que les trois premières, et qu’il naquît un prince des Asturies. La grossesse de la reine fut un coup de foudre pour les apostoliques ; mais enfin il leur restait encore une dernière chance, il pouvait naître une fille, et alors en vertu du droit salique la succession n’en appartenait pas moins au protégé des moines, à don Carlos. Nous voici ramenés au point d’où nous étions partis. La grossesse de Christine était donc en de telles conjonctures un événement capital ; elle était le signal d’une révolution.

Ferdinand, on le comprend, n’aimait pas son frère, il aimait en revanche sa jeune femme ; de l’union de ces deux circonstances naquit la fameuse pragmatique sanction du 29 mars. Ferdinand voulait à tout prix éloigner don Carlos du trône ; la reine y était bien plus intéressée que lui, puisque l’avènement de l’infant, son irréconciliable rival, eut été pour elle une disgrâce éternelle ; don Carlos roi, elle perdait à jamais l’espoir, assez naturel dans son état, d’une régence qui dès-lors était son idée fixe. Si l’on

    entra en pleine révolte le 14 août 1825, et parcourut une partie de la Castille en proclamant don Carlos. Il fut arrêté par le comte d’Espagne, le 15, près de Molina d’Aragon, et fusillé avec sept officiers qui avaient suivi sa fortune. Quant à l’insurrection de 1827, dite des agraviados (ulcérés), elle fut plus grave. La Catalogne en fut le théâtre, et l’on a prétendu qu’elle cachait une arrière-pensée d’indépendance provinciale. Nous aurons dans la suite l’occasion de revenir sur ce tragique épisode de la restauration espagnole.