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France. Elle avait sauvé la Grèce ; elle y avait envoyé une armée ; elle avait forcé les vainqueurs à l’évacuer ; elle avait réparé ses ruines, réuni ses habitans dispersés, rétabli, soldé son gouvernement et dépensé 80 millions pour cette expédition. Et le moment arrivé de tirer le fruit de son intervention, de placer un souverain de son choix, elle livrait la Grèce au prince de Cobourg, à une créature de l’Angleterre ! Il n’est pas de termes pour exprimer le mépris qu’inspirait à M. Thiers ce qu’il nommait la profonde incapacité et l’indigne soumission du gouvernement français. Depuis, M. Thiers ministre votait, dans le conseil, pour les subsides du roi Othon, le lieutenant de la Russie en Grèce.

L’expédition d’Alger se prépare. C’est une belle, une grande et noble guerre ! M. Thiers, qui a toujours montré un enthousiasme si vrai pour les hauts faits nationaux, M. Thiers devait voir avec une joie toute patriotique les préparatifs de cette flotte et de cette armée, destinées à affranchir la Méditerranée dont il souhaitait si vivement l’indépendance. D’abord M. Thiers s’adresse aux chambres. On sait bien, dit-il, qu’elles ne confieront pas 25,000 Français, des vaisseaux et des millions à M. de Polignac, même pour venger l’honneur de la France ! Voyant que la haine contre M. de Polignac ne l’emporte pas, dans les chambres, sur l’amour du pays, et que le ministère obtient ses vaisseaux et ses soldats, M. Thiers prend une autre marche. Il se jette avec un parti pris, sur les cartes marines et sur les livres de voyage, ne prenant note que des écueils, des rochers et des brisans, ne lisant que le récit des déroutes et des malheurs subis par les anciennes expéditions, et s’arrêtant aux descriptions les plus exagérées de tous les fléaux qui attendent les Européens en Afrique. Tremblez, hardis marins ! tremblez, soldats de Napoléon ! et vous, les enfans de ces soldats qui combattirent en Égypte, aux Alpes, sur les glaces de la Russie, entre les défilés de l’Espagne et dans les marais de la Hollande, il s’agit de franchir la Méditerranée et d’aller attaquer une place devant laquelle a échoué Charles-Quint ! Tremblez et apprenez, en lisant les articles de M. Thiers, général expérimenté, à connaître toutes les difficultés de cette campagne. — D’abord, il faut aborder, chose difficile ; — ensuite, on aura à se couvrir, et du côté de la place, et du côté de la campagne ; — on verra voltiger