adopter tout ce qu’ils pratiquent. Pourquoi tant se hâter de faire passer toutes ces lourdes plaisanteries, toutes ces pénibles contorsions d’esprit dans la langue de l’Ingénu, des Lettres persanes, de Gil-Blas, etc., etc. ? Avez-vous eu peur, monsieur Laroche, que M. Defauconpret oubliât de traduire de l’anglais un roman quelconque ? En vérité, pour un Français, vous vous êtes montré peu généreux envers l’Amérique ; vous avez rudement commencé les hostilités.
Et vous, monsieur Cooper, au nom de vos lecteurs des deux mondes que vous avez affligés d’une si pénible lecture, nous vous en prions, retournez bien vite dans vos forêts vierges, aux sources du Susquehannah, ou dans vos immenses prairies, ou sur les plaines plus immenses de votre océan, et de là racontez-nous encore un naufrage bien terrible ou une de ces poétiques sauvageries que vous racontez si bien.
Si nous réunissons dans la même page ces deux nouveaux recueils de vers, ce n’est pas qu’il y ait entre eux beaucoup de ressemblance. Loin de là ; à part le manque d’inspiration vive et de franche originalité qui se fait également sentir dans l’un et dans l’autre, tout en est différent. M. de Gaville respecte religieusement les us et coutumes de notre versification classique, il est orthodoxe selon Boileau. M. Chaudes-Aigues, au contraire, est en pleine hétérodoxie : il ne respecte rien, pas même la critique ; il ne reconnaît, en littérature, ni lois positives, ni principe d’autorité ; et tandis que l’auteur des Soirs, mesurant sa pensée autant que son expression, se borne humblement à chanter en vers presque tous irréprochables la Bibliothèque de l’homme de lettres, ou son Cabinet d’étude, il ose, lui, franchir toutes les bornes, il adresse ses vers au Cauchemar, au Délire, au Cimetière, au Désenchantement, voire même au Choléra !…
L’auteur des Soirs nous dit à la fin de sa préface : « En destinant à la publicité des poésies écrites d’abord pour moi seul, un nouveau travail, une conception nouvelle, étaient nécessaires ; j’ai fait ma tâche avec conscience ; et vous, mes lecteurs, si j’en ai, indulgence aux essais. » Cet aveu nous désarme ; nous ne dirons rien de plus de ce livre.
Mais M. Chaudes-Aigues !… c’est lui qui a un terrible compte à régler avec la critique ! Ce n’est pas de sa bouche qu’on entendrait sortir de tels aveux. Demander de l’indulgence à un lecteur ! pitié !… erreur