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s’occupe de cette reprise, vous croiriez sans doute qu’il invente un finale nouveau pour son œuvre. Pas du tout ; il met la main à cette profanation, et l’excuse par son exemple. Maître, il vous est permis de vous arrêter au milieu de votre glorieuse carrière et d’éteindre sous la cendre tant de génie et de flamme ; mais les chefs-d’œuvre que vous nous avez donnés nous appartiennent, il ne dépend plus de vous de nous les retirer. Brisez votre plume, Rossini, si elle ne doit plus vous servir qu’à effacer les belles choses que vous avez écrites.

L’opéra de Meyerbeer ne sera pas représenté avant les dernières semaines du mois de janvier. Rien n’est curieux comme le zèle que mettent certains journalistes à parler des beautés de cette musique dont ils ne connaissent pas une note. L’un proclame la romance de Mlle Falcon un chef-d’œuvre ; l’autre préfère le trio de la fin ; celui-ci goûte fort les chœurs ; celui-là tient aux airs de ballet. C’est plaisir de voir ces esprits s’ébattre une fois dans le champ libre de l’imagination. Pour peu que cela dure, ils inventeront une partition fantastique dont Meyerbeer sera jaloux. L’autre jour un journal parlait de l’effet merveilleux que devait produire dans le finale du second acte une décharge de mousqueterie. En vérité, ce sont là des moyens nouveaux ; il appartenait au musicien qui a imaginé d’augmenter les forces vocales avec des porte-voix, d’introduire dans l’orchestre des tromblons et des arquebuses ; des gammes chromatiques produites par des coups de mousquets qui se succéderaient avec la rapidité des notes dans le gosier de M. Dabadie, ne seraient pas d’un médiocre effet. À de pareilles stupidités on ne sait que répondre ; heureusement le public n’en est pas la dupe, et l’esprit et le tact de l’auteur du Crociato et de Robert le Diable sont trop connus partout pour que l’on puisse craindre qu’il aille jamais demander des ressources d’harmonie aux instrumens grossiers et barbares du camp de Kalisch.

L’Opéra-Comique rédige son nouveau programme, où brillent en première ligne les noms de Meyerbeer, de Mercadante, de Mme Damoreau, d’Inchindi et de Chollet. Il a fallu traverser bien des hésitations et des ruines pour en arriver là. Quoi donc ! notre théâtre national abandonne M. Adam, ce Français né malin qui au-