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REVUE DES DEUX MONDES.

JACQUELINE.

Il s’agissait d’être surpris, d’être tué peut-être, traîné en prison ; que sais-je ? c’est horrible à dire.

FORTUNIO.

Je savais tout.

JACQUELINE.

Vous saviez tout ? vous saviez tout ? Vous étiez caché là, hier, dans cette alcôve, derrière ce rideau. Vous écoutiez, n’est-il pas vrai ? vous saviez encore tout, n’est-ce pas ?

FORTUNIO.

Oui.

JACQUELINE.

Vous saviez que je mens, que je trompe, que je vous raille, et que je vous tue ? vous saviez que j’aime Clavaroche, et qu’il me fait faire tout ce qu’il veut ? que je joue une comédie ? que là, hier, je vous ai pris pour dupe ? que je suis lâche et méprisable ? que je vous expose à la mort par plaisir ? vous saviez tout, vous en étiez sûr ? Eh bien ! eh bien !… qu’est-ce que vous savez maintenant ?

FORTUNIO.

Mais, Jacqueline, je crois… je sais…

JACQUELINE.

Sais-tu que je t’aime, enfant que tu es ? qu’il faut que tu me pardonnes ou que je meure, et que je te le demande à genoux ?


Scène DERNIÈRE.

La salle à manger.
MAÎTRE ANDRÉ, CLAVAROCHE, FORTUNIO et JACQUELINE, à table.
MAÎTRE ANDRÉ.

Grâces au ciel, nous voilà tous joyeux, tous réunis, et tous amis. Si je doute jamais de ma femme, puisse mon vin m’empoisonner !

JACQUELINE.

Donnez-moi donc à boire, monsieur Fortunio.

CLAVAROCHE, bas.

Je vous répète que votre clerc m’ennuie ; faites-moi la grâce de le renvoyer.