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je dis grenouilles, car, à la couleur verte du dos, à la blancheur du ventre et à l’allongement du train de derrière, il était aisé de les reconnaître pour telles. »

Dans la séance du 26 novembre, on eut sur le même sujet une communication de M. Berthier, étudiant en médecine, élève interne à l’hôpital Saint-Louis.

« Vers la fin du mois d’avril 1830, je chassais, dit-il, près de Marrat, village peu distant d’Avallon, département de l’Yonne. Une pluie qui survint pendant une chaleur étouffante m’obligea de me réfugier dans une hutte de pâtres. Après une première ondée de cinq à six minutes, je me disposais à me remettre en route, lorsque, levant la tête pour regarder la direction des nuages, je reçus sur le visage cinq à six petits corps qui me semblèrent des gouttes de pluie ; mais en regardant autour de moi, je vis qu’avec la pluie il tombait de petits crapauds, dont quelques-uns étaient gros comme une forte noisette ; mon chien, qui jusque-là s’était tenu en avant, vint, en apparence fort effrayé, se blottir entre mes jambes, en faisant entendre des cris plaintifs. Quelques minutes après, la pluie augmenta avec violence ; et lorsque je quittai mon abri, où j’avais été obligé de revenir, l’eau qui ravinait la pente où je me trouvais avait entraîné une grande partie de ces batraciens. Cependant, sur tout l’espace que je traversai pendant près d’un quart d’heure de marche, la terre en était couverte d’une quantité considérable. »

Parmi les communications faites à l’Académie, il en arriva une qui se rapportait à une pluie de poissons ; mais avant d’en parler, je dois dire que j’ai reçu encore, et de plusieurs témoins oculaires, d’autres renseignemens plus ou moins concluans, relativement aux pluies de grenouilles.

En 1821, dans un village situé à quatre lieues de Stenay, département de la Meuse, un orage violent ayant éclaté pendant la nuit, on trouva le matin tant de grenouilles et de crapauds dans la rue, qu’on ne pouvait faire un pas sans en écraser plusieurs. On apprit avec surprise que les villages des environs n’avaient eu ni pluies, ni crapauds, mais on sut aussi qu’un château situé à un quart de lieue avait eu ses fossés et ses mares desséchés complètement par un tourbillon ; or, comme ces fossés et ces mares étaient peuplés auparavant d’une multitude innombrable de grenouilles et de crapauds, on resta convaincu qu’ils avaient été enlevés de ces lieux par la trombe, laquelle les avait ensuite laissés retomber sur le village dont nous parlons.

La conjecture est assez bien fondée ; toutefois la chose serait plus sûre si on avait vu tomber les crapauds ; l’observation suivante, au contraire, est tout-à-fait exempte d’hypothèses.