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LE PARLEMENT ANGLAIS.

cipalités une fin de non-recevoir formelle, à quoi bon nous dire que sa conscience en improuve le principe aussi bien que celui de la réforme du parlement ? Il examine longuement la balance des pouvoirs ; il explique habilement en quelles circonstances une assemblée peut ou doit céder à la force extérieure. — La vraie sagesse serait, à mon sens, de se régler par ces théories, sans les exprimer publiquement.

Le duc de Wellington a plus de naïveté. — « Sauf quelques détails, ce bill est détestable, opine sa grace ; toutefois il y a au dehors une forte opinion en sa faveur ; il convient de le prendre en considération. »

Le duc de Newcastle, lord Falmouth et quelques autres tories extrêmes protestent vainement contre la timidité de ce conseil. Leur voix, généreusement téméraire, est étouffée sous les voix qui se croient prudentes, et qui ne sont qu’inutilement peureuses. Le bill est pris en considération ; on le reçoit enfin en comité.

Que si les bruits du dehors eussent continué de gronder, soyez-en sûrs, la réforme des corporations sortait intacte et bien vivante des mains de leurs seigneuries. Les lords ne sont pas hommes à lutter contre le péril imminent ; revenus de leur première frayeur, ils se ravisent ; ils se hasardent à tâter le pouls du pays. Malheureusement le pays avait bien un peu de fièvre, mais non pas le transport ; il a besoin, à ce qu’il semble, qu’on le pousse quelque temps pour que le délire le prenne.

— « Ce malade n’est pas calme, ont observé les nobles législateurs, en imprévoyans docteurs qu’ils sont ; cependant il n’y a rien à redouter de lui présentement. Ne nous décourageons pas, le bill est encore à notre discrétion. Voyons si sans le tuer précisément, il n’y a pas moyen de le renvoyer aux communes plus mort que vif. »

Effectivement, le malheureux bill était toujours pieds et poings liés à leur merci. Ce fut un cruel supplice qu’il eut à subir là durant quatre nuits. Le voici couché sur la table du comité comme sur celle d’un amphithéâtre ; on aiguise à l’envi le couteau des amendemens. Lord Lyndhurst, l’opérateur principal, dirige les mutilations ; c’est lui qui enfonce le scalpel le plus avant ; c’est lui qui pratique les entailles les plus larges et les plus profondes. D’ailleurs, chacun veut couper son morceau ; qui tel paragraphe, qui tel autre, qui tel article tout entier. Ce qu’ils ont laissé de chair au corps disséqué, n’est guère plus que ce qu’il en reste à un squelette.

Ainsi, voilà l’œuvre de la pairie ; voilà ce qu’elle a mis un mois à faire ou plutôt à défaire. Si à cette destruction elle eût montré seulement le facile mérite d’un courage insolent ! — Elle n’a été que lâchement et