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LE PARLEMENT ANGLAIS.

Étrange cavalier, en effet, qui vous a plus surpris encore lorsqu’il a mis pied à terre et qu’il est entré à son club la cravache en main, vous laissant mieux distinguer le reste de son costume quasi franc-maçonnique, ses hautes guêtres noires et son tablier noir. Ce n’était rien moins qu’un très noble et très révérend évêque anglican.

Et cet autre en pareille toilette, tout noir également, qui s’élançait du milieu de cette calèche pleine de jeunes dames blanches et roses, comme nous traversions la place de Westminster ? c’était un évêque que sa femme et ses filles venaient de conduire au parlement.

Mais suivons ces nobles lords spirituels sur leurs siéges de législateurs.

Figurez-vous une vieille au visage jaune et décharné ; courbez-la sous le poids de quatre-vingts années, creusez son front d’autant de rides que vous pourrez ; qu’elle ait la voix aigre et cassée, l’œil faux, inquiet et soupçonneux : ne sera-t-elle pas un portrait fidèle de sa grâce l’archevêque de Canterbury, le premier prélat de l’Angleterre, à ce moment assis seul au premier banc de l’église ? C’est la superstition elle-même, n’est-ce pas ? toute décrépite, accroupie et tremblotante.

Ce vénérable archevêque, si suranné et hors de service qu’il vous semble, a cependant très bien la force de parler dès que l’intérêt des revenus de l’église est touché le moins du monde. Ses manières de sermons débutent alors invariablement par de louables réflexions sur les avantages de la tolérance, mais ils aboutissent tous à souhaiter la damnation du papisme sur la terre comme dans les cieux. C’est au moins là leur sens intime, car il n’est pas aisé de saisir leur signification. Sa grâce, qui tient son archevêché de la divine Providence, n’en a pas reçu le don d’exprimer facilement ses rancunes religieuses. Elle a besoin d’un grand travail pour formuler ses homélies anti-catholiques, pleines d’incohérence et semées de fréquentes interruptions. On ne saurait dire que le fiel coule des lèvres de ce doux prélat ; il le crache plutôt.

Ce fut un plaisant mouvement d’éloquence qui le fit se lever un jour tout hors de lui et vertement tancer lord Fitz William, parce que ce duc impie avait poussé le blasphème jusqu’à demander si la religion protestante n’était pas une secte. Voyez en effet la proposition monstrueuse ! N’est-il pas avéré que c’est l’église catholique, la mère de toutes, qui est la secte dissidente ? Je vous le dis, en vérité, ce seront bientôt ces docteurs anglicans qui auront inventé le christianisme et découvert l’Évangile, sous un de leurs bonnets d’Oxford ou de Cambridge.

Derrière sa grâce, n’apercevez-vous pas ce petit homme fauve à