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ÉRASME.

Arrivé à Fribourg, il fit deux quatrains qui peignent admirablement son caractère, mélange d’enjouement et de sensibilité douce ; pourquoi le cacherais-je ? caractère moyen en toutes choses, aussi loin des passions furieuses que des affections trop vives, et n’ayant guère de regrets que de quoi en remplir une épitaphe ou un quatrain.

Le premier de ces quatrains est une allusion aux pluies continuelles qui le reçurent à Fribourg :


Que signifie cette tempête qui, du haut des airs,
Fond sur nous nuit et jour ?
Puisque les habitans de la terre ne veulent pas pleurer leurs crimes.
Le ciel, à leur défaut, se fond en larmes[1].


Le second est un adieu à Bâle qu’il avait adoptée pour patrie. S’il faut l’en croire, il aurait fait ces vers en montant dans la barque, au moment où nous le croyions fort inquiet des sentimens du peuple qui assistait à son départ.


Adieu Bâle, adieu, de toutes les villes
Celle qui m’a offert, pendant plusieurs années, la plus douce hospitalité.
De cette barque qui va m’emporter, je te souhaite tous les bonheurs, et surtout
Qu’il ne t’arrive jamais d’hôte plus incommode qu’Erasme.


C’est un adieu doux ; ce n’est pas un adieu triste. L’ombre de Froben demandait mieux que ce quatrain.

ix.
Mort d’Érasme. — Les portraits.

Après avoir quitté Bâle, Érasme rejoignit ses bagages qui l’attendaient dans une petite ville des bords du Rhin, d’où il partit, par la route de terre, pour Fribourg en Brisgaw. Les magistrats

  1. Tout cela est fort mauvais en français et n’est pas bon en latin. Je le donne comme trait de caractère, non comme modèle du genre.