Page:Revue des Deux Mondes - 1835 - tome 3.djvu/483

Cette page a été validée par deux contributeurs.
475
DOCTOR MARGARITUS.


Oh ! de ta couche immaculée,
Marguerite de la vallée,
Lève-toi, ma sœur, lève-toi.
Voici Pâque, on sonne mâtine ;
Mets ta croix d’or sur ta poitrine,
Et cours vite chez ta voisine :
Déjà la rue est en émoi.
Viens, jeune fille d’Allemagne,
À ces reines de la campagne
Montrer ton sang pur et vermeil ;
Et leur faire voir, ma petite,
Que toi seule es la Marguerite
Des poètes et du soleil.


La vierge blonde alors suspendit sa prière,
Et dans un frais rayon de tremblante lumière
Bientôt elle sembla grandir, mais à regret.
Et, pareille à l’enfant que l’on rappellerait
Du monde où son esprit dans le rêve s’envole,
Pour lui dire qu’il faut s’en aller à l’école
Et que l’heure a sonné des pédantes leçons,
Long-temps elle marcha triste sur les gazons ;
Et je la reconnus à son air, c’était elle,
C’était la Marguerite, adorée, immortelle,
La maîtresse de Faust, la sœur de Valentin,
Celle qui se réveille en chantant le matin,
Qui croit à Jésus-Christ, aux anges, au mystère,
Aux étoiles du ciel, aux roses de la terre,
Aux longs regards des yeux, aux paroles du cœur,
À la vie éternelle, à l’amour, au bonheur,
À tout enfin, hormis au mal qui la conseille,
Et marche à ses côtés et lui parle à l’oreille.

Sitôt qu’elle eut remis son vêtement de lin,
Et dans ses blonds cheveux arrangé sa cornette,
Elle courut pieds nus sur le pré du jardin,