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DOCTOR MARGARITUS.


La violette alors s’avança toute seule.
Or, celle-là branlait une tête d’aïeule,
Et sur un roseau frêle, étrangement taillé,
Soutenait, en marchant, son corps faible et ployé.
Et les brins d’herbe verts, debout dans la prairie,
Voyant son air malin et sa face amaigrie,
Se parlaient à l’oreille et riaient aux éclats ;
Et la duègne alors les foulait sous ses pas,
Ou leur brisait le front d’un coup de sa béquille ;
Et c’était curieux de voir la vieille fille
Sans cesse s’arrêter en ce petit enclos,
Tantôt pour réprimer les insolens propos
Des gazons étourdis et des petites plantes,
Tantôt pour admirer les poses indolentes
D’un jeune lis penché sur une goutte d’eau,
Et qui semblait heureux de se trouver si beau.


Rentre, duègne, dans ta serre ;
La fraîcheur qui mouille la terre
Est fatale pour tes vieux os.
Rentre, duègne, rentre vite
Sous la coupole qui t’abrite,
Tu n’es pas non plus Marguerite.
Mais si tu veux, à tout propos,
Jouer un rôle en ce poème,
Dépouille-moi ce diadème,
Et rougis de vin ton front blême,
Et tu seras Marthe soudain ;
Et tu pourras, vieille boîteuse,
Redevenir entremetteuse,
Comme tu l’étais sur ta fin,
Et le dimanche, après l’office,
Avec le diable, ton complice,
Causer d’amour dans le jardin.


Alors il se passa la plus étrange scène :
Tous les petits serpens du bois et de la plaine,