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REVUE. — CHRONIQUE.

souverain pour exiger de lui un acte aussi décisif, et les antécédens de M. de Metternich auprès de l’empereur actuel, quand il n’était encore qu’archiduc, l’obligent à de grands ménagemens. On comptait beaucoup sur l’anéantissement de la révolution en Espagne et le triomphe de don Carlos ; on se disposait à faire quelque chose de décisif quand la sainte-alliance se serait trouvée fortifiée de ce côté ; mais la mort de Zumala-Carréguy pourrait bien entraver les affaires de don Carlos, et retarder encore pour quelque temps l’expédition du manifeste de Carlsbad.

D’ailleurs, les embarras de M. de Metternich augmentent sans cesse. Chaque jour, l’empereur Ferdinand montre moins de sympathie pour son habile et profond ministre. On sait que l’empereur a refusé de transmettre à la députation lombarde la réponse royale que lui avait formulée M. de Metternich, et que sa majesté apostolique a rayé, de sa propre main, la phrase de ce rescrit, par laquelle on déclarait qu’il ne serait apporté aucun changement à la politique qui régit les possessions de l’Autriche en Italie. Cette circonstance a produit un grand effet à Vienne, où il a été fortement question de la retraite de M. de Metternich. Nous ne pensons pas que M. de Metternich se retire, et sa retraite, si elle avait lieu, ne serait certainement pas de longue durée, tant les embarras s’accroîtraient autour du nouveau monarque, dont la situation offre beaucoup d’analogie avec celle de Louis xiii avec Richelieu. Il résulte toutefois de ces différends que la main de M. de Metternich s’appesantira moins rudement sur l’Italie, et que ses négociations diplomatiques, si absolues jusqu’à ce jour, seront désormais soumises à un contrôle qui le gênera. Les conférences de Kalish et de Carlsbad se ressentiront d’abord de la position de M. de Metternich, et elles perdront ainsi une grande partie de leur importance.

C’est encore vers M. de Talleyrand que se tournent toutes les inquiétudes ; c’est de lui qu’on craint et qu’on espère, non pas un dénouement ni une solution, qui sont choses impossibles, mais un biais pour empêcher un choc entre la quadruple alliance et la sainte-alliance, une façon d’accommodement et d’attermoiement entre les principes opposés qui se donnent aujourd’hui rendez-vous en Espagne, comme pour en finir par un combat singulier. M. de Rigny, envoyé, en manière de promenade, du côté de la Belgique et du Rhin, a fait sentir la nécessité d’avoir au nord un diplomate plus habile et plus en crédit que lui, et M. de Talleyrand, à la lecture de ces dépêches, tout guéri de la goutte qui l’a empêché de prendre part au procès, s’est senti subitement atteint d’une indisposition qui l’oblige d’aller d’eaux en eaux jusqu’à Carlsbad. Son médecin ordinaire l’engage à quitter de nouveau Paris où il est de retour, et à essayer alterna-