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ou à Clairvaux. M. Thiers fut inexorable ; il déclara qu’il avait le droit de choisir entre les maisons de détention ; qu’un écrivain, ne fût-il condamné qu’à un jour de prison, le ministre était maître de lui faire passer ce jour dans un cachot, et dans un cachot à l’extrémité de la France. En fin, il s’exprima avec tant de violence, que Béranger sortit la tête baissée, en regrettant peut-être M. Corbière. M. Trélat ira donc à Clairvaux, et Dieu sait s’il n’est pas destiné à figurer, à son tour, sur la charrette de M. Lionne.

Quelques journaux assurent que le voyage de M. le duc d’Orléans n’est autre chose qu’une sorte d’exil, qui lui aurait été infligé pour avoir fait quelques caricatures sur M. Thiers, et l’avoir représenté sous les haillons de Robert Macaire. On s’est trompé. D’autres attribuent le départ du prince au désir de voir la princesse de Wurtemberg dont il a été question. Il n’en est rien non plus. M. le duc d’Orléans voyage uniquement pour son plaisir, et non pour celui de M. Thiers, ou pour chercher, en chevalier errant, une princesse à conquérir. On l’a vu sur les bords du lac de Genève où se trouvaient, par hasard sans doute, quelques-unes des plus jolies femmes de la société de Paris ; mais pour l’alliance projetée avec la maison de Wurtemberg, il en est peu question maintenant. Accorder une princesse de la sainte-alliance à un prince de la maison de juillet est une décision trop grave pour ne pas la soumettre au jugement des souverains, et la réponse de l’empereur de Russie, qui a été consulté par le roi de Wurtemberg, viendra sans doute de Kalish et de Carlsbad.

Plus le moment de ces conférences approche, plus les instances auprès de l’empereur d’Autriche augmentent. Jusqu’à ce jour l’empereur a répondu négativement aux deux invitations qui lui ont été faites. La cour de Vienne allègue des raisons d’étiquette. Le Puntiglio de la maison de Lorraine n’admet pas, dit-on, que l’empereur puisse se rendre à une conférence chez le roi de Prusse. Il est prêt à recevoir ses alliés dans ses états héréditaires, mais le choix de Kalish est un obstacle à sa présence dans le congrès. On espère toutefois vaincre cette résistance ; en attendant, il serait bien curieux de connaître les démarches sans nombre et les efforts inouis des ministres étrangers pour obtenir cette concession de la cour de Vienne.

La nouvelle de la prochaine publication d’un acte diplomatique lancé de Carlsbad, et dont parle le Mercure de Souabe, est bien prématurée encore. C’est annoncer le résultat des démarches qu’on fait en ce moment, avant que ces démarches aient eu encore le moindre succès. Il est évident que le refus de l’empereur d’Autriche de se rendre à Kalish est une fin de non-recevoir opposée à ce projet de manifeste et de resserrement d’alliance. M. de Metternich ne se trouve pas encore assez maître de son