Page:Revue des Deux Mondes - 1835 - tome 2.djvu/771

Cette page a été validée par deux contributeurs.
765
REVUE. — CHRONIQUE.

sept fois de ministère que de céder sur cette question. » Ce mot est vrai. Le roi a dit encore : « Je prendrais demain un ministère dans la gauche, oui, dans la gauche, si cela était nécessaire pour éviter l’intervention. »

Quoi qu’il en soit et quoi qu’il advienne, le roi ne prendra pas un ministère de la gauche, mais il est certain qu’il cherche, avec sa prévision ordinaire, à se préparer un cabinet pour remplacer celui-ci. Le maréchal Soult est tombé en ruines, le tiers-parti n’existe plus, même de nom ; l’extrême gauche se divise en vingt fractions, qui sont toutes plus antipathiques au roi les unes que les autres ; on voit qu’il n’est pas facile de trouver des ministres à son gré, ou même des ministres. Cependant, au milieu des débats que la question d’intervention a fait naître, et dans les craintes qu’elle a causées, on s’est encore une fois souvenu de M. Molé. On s’est rappelé que M. Molé avait posé et défendu le principe général de non-intervention à une époque où il y avait du courage et une haute habileté à le faire. L’Europe vivait alors sur un principe contraire. La sainte-alliance y dominait, et s’était engagée à comprimer toutes les révolutions qui pourraient éclater dans les états dont les souverains avaient signé le traité de Vienne. Or on sait que la France y avait accédé, et que la campagne d’Espagne lui avait été imposée en vertu de ce traité. En posant, en 1830, le principe de non-intervention, M. Molé avait créé un nouveau droit public en Europe. Il avait sapé le principe fondamental de la sainte-alliance, préparé notre coalition avec l’Angleterre, et par suite la quadruple alliance. L’indépendance de la Belgique avait été le premier résultat de ce principe fécond, fécond dans ses développemens surtout, en ce que la France, en exigeant la non-intervention des puissances, avait déclaré qu’elle interviendrait partout où une autre puissance s’aviserait d’intervenir. On peut donc juger combien la conversation de M. Molé était recherchée ces jours passés au château ; comme on le citait, comme on s’appuyait de ses argumens, lui la non-intervention en personne ! Il est vrai que M. Molé exerce encore une haute influence en Angleterre, où il compte beaucoup de partisans et d’amis, et qu’on espérait le faire servir à contrebalancer les menées de M. Thiers. Avec l’urgence, le crédit de M. Molé a dû diminuer ; mais comme il l’a dit, la question d’intervention commence seulement, et il se peut que bien prochainement on ait recours à lui.

Le procès épisodique de la chambre des pairs s’est terminé par des rigueurs qu’on a peine à s’expliquer, tant la répartition en est peu régulière. La condamnation des deux gérans à un mois de prison et à dix mille francs d’amende satisfaisait, ce nous semble, à la loi ; ou pour