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la France. L’association de Munich et de Speyer blesse la nature des choses ; elle a jeté le gouvernement bavarois dans d’indignes persécutions contre l’amour de la liberté ; tout cela est faux, violent, inepte.

La diplomatie européenne est tombée dans une autre erreur, quand elle a commis à la Bavière le soin d’apporter à la Grèce la civilisation moderne. Cette tâche est au-dessus des forces du Bavarois, dont la nature loyale, mais molle, et pour ainsi parler un peu pâteuse, n’a pas l’énergie nécessaire à une puissance initiatrice. Puisque l’on voulait donner à la Grèce des leçons et un appui contre la Russie, il fallait choisir entre les trois seuls foyers de force et de lumière, assez riches et assez énergiques pour se répandre au loin, Londres, Paris et Berlin. Ces trois nations avaient seules la vigueur capable d’élever et de protéger la Grèce. Mais on a évité de donner à un état puissant l’occasion d’une gloire utile à tous, comme si la grandeur et la vérité des choses se payaient de ces petites raisons !

Dans une guerre générale où elle ne serait pas notre alliée, la Bavière se trouverait dans de sérieux embarras ; elle ne pourrait défendre contre nous ses provinces du Rhin ; nous pourrions aller porter en Grèce nos flottes et nos soldats. La monarchie bavaroise ne saurait se sauver de l’étreinte de l’Autriche qu’avec l’appui de Berlin ou de Paris. Si elle se laissait entraîner encore dans une coalition contre la France, elle serait à la merci d’une bataille. En tout cas, sa situation n’est pas dans la mesure de ses forces, c’est trop pour elle d’avoir à s’occuper du Rhin et d’Athènes.

Rester intérieurement l’ennemie de l’Autriche, attendre le moment où doivent se détraquer les parties de cet empire, être prêt à devenir le centre et la force de l’Allemagne méridionale et constitutionnelle, s’assurer à jamais l’amitié de la France en lui rendant Speyer et Landaw, voilà la véritable politique de la Bavière.

Si j’étais roi, je n’aurais jamais consenti à céder Salzbourg : c’est trop beau pour être abandonné. Cette contrée, qui a passé du sceptre de la Bavière à celui de l’Autriche, a des enchantemens qui demandent, pour les quitter, un héroïque courage. À quoi bon partir pour aller ailleurs ? La nature vous retient avec instance ; la pensée devient plus lente, et ne vous sollicite plus au changement ; la religion catholique, présentant à chaque pas ses images, engage