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malheureux ? Mais à Hanau ils furent hachés : châtiment mérité par ceux qui oubliaient qu’en politique le succès final appartient toujours à la moralité du dévouement et de la fidélité.

La Bavière a quatre millions d’habitans et une armée de quarante-cinq mille hommes ; elle a trois universités. En 1818, elle reçut une constitution où la liberté lui était parcimonieusement mesurée. Deux chambres, convoquées tous les trois ans, l’aristocratie siégeant dans la seconde[1] comme dans la première, indiquent avec quelles restrictions les franchises constitutionnelles ont été octroyées. Le Bavarois est franc et généreux ; sa gaieté le fait parfois tomber dans des facéties un peu lourdes ; il aime à danser, à boire cette bierre de Munich qui lui semble si bonne et qui le plonge dans une douce quiétude, ou dans des joies bruyamment paisibles, qu’il termine volontiers par d’autres plaisirs.

Je voudrais peindre avec vérité le roi. On ne saurait nier que Louis de Bavière n’ait toujours aimé sincèrement la gloire : il la désirait quand à la fête d’Interlaken il se plaignait à de jeunes femmes de combattre dans les rangs français contre la liberté allemande ; il voulait la conquérir d’un coup, quand, au théâtre de Munich, les applaudissemens prodigués au marquis de Posa réclamant la liberté de la pensée, le poussèrent précipitamment hors de la salle pour signer sur-le-champ l’abolition de la censure. Le régime constitutionnel lui parut aussi une occasion de popularité. Mais c’est surtout aux arts, à des monumens nouveaux et immortels, dont il veut peupler Munich, que le roi Louis semble confier la perpétuité de son nom. Il demande la gloire aux travaux des sculpteurs et du peintre, aux efforts de l’architecture, à l’acquisition des merveilles mutilées de l’art antique. L’amour de la gloire est louable dans tout homme, surtout dans un roi, mais il ne saurait se passer du consentement et des dons de la nature pour arriver à se satisfaire un peu. Or, Louis de Bavière n’a reçu de la grace de Dieu que le trône ; et sous sa couronne, il manque de la royauté du génie. Son esprit est médiocre, non pour avoir écrit de méchans vers, Frédéric en faisait de détestables, mais parce qu’il ne montre

  1. La chambre des députés se compose de 115 membres, dont un huitième est pris dans la noblesse.