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trois fois sa courageuse constance fut obligée de céder devant les obstacles insurmontables que lui offraient les glaces.

Repoussé de ce côté, Parry reçut le commandement d’une troisième expédition, destinée à tenter la fortune dans la passe du Prince-Régent, seul point qui laissât quelque espoir de succès. Il partit en 1824 avec les mêmes bâtimens, et après avoir hiverné dans le détroit de Lancastre et Barrow, il pénétra, au mois de juillet 1825, dans la passe en question. Parvenu par les 72° 30′ latit. N., près du cap Garry, le Fury eut le malheur de toucher sur les glaces et se perdit. Les agrès et les provisions furent sauvés et mis en sûreté à terre, où le capitaine Ross les a retrouvés à son dernier voyage. Privé de l’un de ses bâtimens et voyant venir l’hiver, Parry revint sur ses pas sans avoir fait de nouvelles découvertes importantes.

Pendant son absence, le gouvernement avait envoyé à sa rencontre, dans le détroit de Behring, le capitaine Beechey. Celui-ci, dépassant le Cap des glaces, atteignit les 71° 25′ 50″ lat. N. et 156° 21′ 50″ long. O., s’approchant ainsi à cinquante lieues environ de la limite occidentale des découvertes de Franklin.

Tels étaient les progrès que ces tentatives, coup sur coup répétées, avaient fait faire à la question du passage nord-ouest, lorsqu’en 1829, le capitaine Ross, après dix ans de repos, rentra dans la carrière. Son projet, conçu en 1827, fut, à deux reprises différentes, présenté par lui à l’amirauté, qui lui déclara que le gouvernement avait pris la résolution de ne plus se charger de pareilles entreprises. Le capitaine trouva heureusement dans son ami M. Booth, shériff de la Cité de Londres, un de ces hommes rares chez qui une immense fortune s’allie aux idées les plus élevées. M. Booth prit à sa charge tous les frais de l’expédition, qui ont dépassé 18,000 livres sterling (450,000 fr).

Le capitaine, convaincu par expérience qu’un bâtiment à vapeur était préférable à toute autre espèce de navire, en acheta un du tonnage de 150 tonneaux, qu’il nomma le Victory ; et ses préparatifs terminés, il mit à la voile, de la Tamise, le 29 mai 1829. Il devait rejoindre, dans un des ports de la côte occidentale d’Écosse, un baleinier qu’il avait également acheté, et qui était destiné à porter des approvisionnemens pendant le cours du voyage.

Les premiers momens du départ furent signalés par des accidens, tristes présages des malheurs futurs de l’expédition. La machine du Victory se trouva exécrable (ce sont les propres expressions du capitaine Ross), et refusa le service au bout de quelques heures. Après en avoir raccommodé cent fois les pièces qui se brisaient ou se dérangeaient les unes après les