Page:Revue des Deux Mondes - 1835 - tome 2.djvu/464

Cette page a été validée par deux contributeurs.
458
REVUE DES DEUX MONDES.

en pâture une loi de responsabilité. Qu’est-il résulté de cette discussion ? Des amendemens tellement absurdes en matière de gouvernement, que le projet ne sera pas discuté à la chambre des pairs, et qu’il restera dans les cartons du ministère. Ce que la restauration n’avait jamais osé sur l’inviolabilité des agens de l’administration a été admis d’une manière absolue par la chambre comme une maxime du droit constitutionnel. Mille contradictions se montrent dans le projet ; on a discuté tout cela étourdiment, parce qu’il ne s’agissait pas de politique active et dévorante ; l’ennui se mêlait aux discussions ; on n’allait même plus à la chambre.

Ainsi, depuis six mois, il y a eu de l’argent donné ; dans les trois mois qui vont suivre, il y aura un budget voté ; mais les députés n’auront pas laissé un seul gage à l’ordre politique constitué par la Charte. Le cri des centres, c’est que la France a trop de libertés, qu’elle périt par ses franchises. Ils porteront une terrible responsabilité au jour de l’histoire, car enfin les pouvoirs politiques ne sont pas uniquement institués pour pressurer les peuples ; ils sont appréciés par les institutions dont ils ont doté un pays, par le mouvement qu’ils ont imprimé à l’industrie, par l’amélioration qu’ils ont opérée dans les conditions sociales. La main sur la conscience, qu’ont fait les députés de 1834 ? La chambre septennale de M. de Villèle avait au moins un système, elle obéissait à une inspiration ; attachée à la pensée religieuse et aristocratique, elle cherchait à fonder la société sur ces élémens ; ses projets de loi se ressentaient tous de cette situation, tous étaient homogènes, la loi du sacrilége comme celle du droit d’aînesse. Quelle est la mission de la chambre de 1834 ? Quelle pensée réalise-t-elle dans une série de lois et d’actes médités ? Elle veut rétablir l’ordre ; mais ce sont les lois de morale publique, de prévoyance sociale, qui fondent précisément cet ordre. Croit-elle, cette chambre, qu’il suffit de quelques fonds secrets, de quelques dispositions de police pour assurer la société et préparer son avenir ? Les conditions morales sont indispensables à un système. Vous voulez la dynastie et la paix, d’accord ; mais donnez au moins à ces deux principes des conditions de vie et de puissance dans l’ordre des lois et en dehors de la police.

Les formes de notre constitution donnent deux origines aux travaux de la chambre ; ces travaux peuvent être produits à la suite de quelques propositions individuelles, faites par un ou plusieurs membres du parlement, ou bien par les projets réguliers que les ministres viennent apporter à la chambre. Quand la proposition est individuelle, elle est discutée d’abord dans les bureaux, puis elle arrive en séance publique, où le débat s’engage sur de plus larges bases. Nous avons parcouru avec quelque attention la série de ces propositions pour la session présente ; elles se ratta-