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Occupés seuls sérieusement de la civilisation des premiers, il leur fallait sans relâche arrêter la main des seconds, qui, en quelques instans, détruisaient, par un acte de violence, le fruit de longues années de travaux. Ces luttes n’étaient pas sans dangers pour ces religieux, qui assez souvent couraient risque de la vie malgré le respect qu’inspirait alors leur habit. L’attaque dont il vient d’être question était principalement dirigée contre eux, et un chef indien se signala en les défendant.

Quoi qu’il en soit, en moins d’un demi-siècle, il se forma dans la province de Saint-Paul une population mélangée de Portugais qui avaient conservé la pureté de leur sang, d’Indiens et de métis issus des alliances des deux races. Ces derniers, presque aussi nombreux à eux seuls que les autres, reçurent le nom de Mamalucos ou Mamelucs que les historiens de l’Amérique appliquent quelquefois sans distinction à tous les Paulistas de cette époque.

Les mœurs de cette race de fer, son courage indomptable, sa haine pour toute espèce de joug, ses courses gigantesques dans l’intérieur du pays, ont fait de son histoire un épisode à part dans celle du Brésil. Les Paulistas, pendant un siècle et demi, furent sur terre ce que, dans le même intervalle, les flibustiers furent sur les côtes de l’Océan et de l’Amérique espagnole : se procurer des esclaves, et chercher des mines, telles étaient à peu près leurs seules occupations. Lorsqu’ils eurent découvert le petit nombre de celles qui existaient dans leur voisinage, et réduit à rien les peuplades indiennes qui les environnaient, ils étendirent leurs excursions plus loin. Vers 1620 environ, ils commencèrent à envahir les célèbres Réductions indiennes que depuis près de quarante ans les jésuites avaient fondées sur les frontières du Paraguay, et pendant un demi-siècle il ne se passa guère d’années sans qu’ils y fissent des apparitions, pendant lesquelles ils pillaient les riches églises des missionnaires, et emmenaient en captivité tous les Indiens qu’ils pouvaient saisir, sans distinction d’âge ni de sexe. Ce fut une des raisons qui engagèrent les jésuites à armer leurs néophytes, et qui leur ont fait peindre les Paulistas sous de si noires couleurs. Plus tard ces derniers s’avancèrent jusqu’aux frontières du Haut-Pérou, et traitèrent de la même façon les missions naissantes du Gran-