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et l’on peut affirmer que, parmi les Démosthène et les Cicéron qui affluent dans nos chambres représentatives, il n’y a pas dix hommes dont les meilleures phrases, livrées à l’impression, s’élèvent au-dessus de la médiocrité littéraire. Il en est donc de l’éloquence de M. Surlet comme de tant d’autres éloquences qui font beaucoup de bruit chez nous. Il n’y faut pas chercher le côté artiste, ni la puissance de la forme où s’enchâsse l’idée, ni la délicatesse dans le choix des mots, ni l’éclatant coloris qui rend la pensée vivante, et la fixe d’un seul trait dans l’imagination des masses comme un fait qui s’est passé sous leurs yeux. Les discours de M. de Chokier étaient plutôt des causeries que des morceaux de tribune. Ses phrases se présentaient à l’état de trituration, courtes, sans rhythme, sans esprit aucun, complètement dépourvues d’images ; et si parfois une métaphore se faisait jour à travers l’assemblage de ses incolores substantifs, c’était pour revêtir la forme grotesque d’une plaisanterie vulgaire et déchaîner le rire des assistans. De vieilles ruines d’érudition classique lui revenaient souvent à la mémoire, et il parsemait ses étranges plaidoiries de citations d’Horace et de Virgile, qu’il entremêlait de noms hollandais et flamands, prononcés à dessein avec l’accent français, afin de mieux exciter l’hilarité de ses confrères ; ce qui fit dire, au mois de décembre 1830, lorsqu’il fut nommé président du congrès national, qu’il ne savait pas maintenir la dignité de la chambre.

Avant d’arriver à cette présidence du congrès, qui lui valut plus tard la régence du royaume, il quitta Bruxelles avec les autres représentans pour se rendre à La Haye, où le roi Guillaume, espérant encore calmer le premier incendie de la révolution, voulait agiter devant les chambres la question de séparation administrative et la révision de la loi fondamentale. De retour dans la capitale de la Belgique, il vint représenter au congrès le district de Hasselt, et presqu’aussitôt ce même congrès le nomma son président. Ce fut en cette qualité qu’on l’envoya à Paris avec MM. Félix de Mérode, d’Arschot, Lehon, Charles de Brouckère, Marlet, Gendebien, Boucqueau de Villeraie, Barthélemy et de Rodes, pour offrir la couronne de Belgique au duc de Nemours. À cette époque, on fit courir une prétendue conversation de M. de Chokier, qui a été reproduite dans une brochure allemande (der Abfall der Nieder-