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l’âge. Son extérieur rappelle le temps où les princes de l’église laissaient percer volontiers sous le rochet épiscopal le jabot musqué de l’homme à bonnes fortunes ; quelques-uns de ses fidèles vont même jusqu’à le regarder comme dangereux pour leurs femmes, tant la calomnie s’accrédite facilement dans ces petites villes de province, dont la brutale clairvoyance ne sait respecter aucun voile.

L’abbé Van Bommel dirigeait, avant la révolution belge, un petit séminaire près de La Haye. Il vit un jour fermer sa maison par ordre du gouvernement hollandais, sous prétexte que nul ne devait pratiquer l’enseignement public sans avoir été préalablement instruit lui-même selon les réglemens établis. Cette persécution, qui renversait toutes ses espérances, le jeta dans les rangs de l’opposition, et il écrivit plusieurs brochures pour la liberté de l’enseignement, ayant soin toutefois d’abriter sa seigneurie future sous le masque prudent de l’anonyme.

Cette sortie un peu vive n’empêcha pas le gouvernement hollandais de l’envoyer, en 1829, prendre possession de l’évêché de Liége, ce qui contribua peut-être à opérer dans son esprit ce changement subit qu’on y remarqua tout d’abord. Après sa promotion, ce publiciste frondeur, ce champion intraitable de la liberté de l’enseignement, prêchait en pleine église, dans son diocèse, le droit divin et l’obéissance passive. La révolution de 1830 arrêta dans son vol l’éloquence de Mgr de Liége. Il lui fallut de nouveau, embarqué sur un radeau d’argumens improvisés, franchir la cataracte écumante qui séparait le pouvoir déchu du pouvoir naissant, un abîme grondant, plein d’orages et de sinistres, qu’il passa comme Moïse fit de la mer Rouge, sans se mouiller seulement le bout du pied. Mgr Van Bommel, malgré les difficultés sans nombre dont sa qualité de Hollandais, et plus encore ses antécédens politiques, hérissaient son chemin, parvint néanmoins à rentrer en grâce auprès de la révolution à l’avénement du roi Léopold. Il sut se concilier les esprits, et il marche aujourd’hui, avec l’archevêque de Malines à la tête d’un parti tout puissant.

Les catholiques aristocrates, qui reconnaissent l’évêque de Liége et Mgr Sterx pour leurs chefs spirituels, appuient principalement leurs espérances sur trois grandes familles dont les noms, la fortune