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ces scènes de mer, et ces situations variées et dramatiques, ne croirait-on pas se trouver transporté dans le monde imaginaire du roman. Et cependant tout ce que M. Sue rapporte et dépeint dans son ouvrage, événemens et caractères, tout cela est vrai, tout cela est basé sur les faits, étayé par des dates, confirmé par des documens authentiques. C’est de l’histoire, non point de l’histoire racontée d’une manière froide et didactique, jour pour jour, heure par heure, cette histoire qui se traîne avec lenteur dans les plus petits détails, qui se gonfle sans discernement des moindres circonstances, œuvre de patience, de labeur, de pièces rapportées, et dont le premier défaut est de manquer d’ensemble et de mouvement, mais l’histoire prise comme un grand tableau où tous les événemens se condensent sous la main de l’artiste pour être mieux en relief, où tous les personnages ont de l’action, où il y a sur toutes les physionomies un caractère vivant, un type marqué. Ainsi, nous verrons nos Jean Bart, nos Tourville, nos Duguay-Trouin se mouvoir sous nos yeux ; ainsi nous verrons nos escadres de guerre, et nos rencontres, nos victoires maritimes et nos défaites étudiées avec soin, prises sous leur point de vue le plus saillant, dépeintes avec art et chaleur. L’Histoire de la marine française, ainsi conçue, est une œuvre toute neuve, toute palpitante d’intérêt, une de ces œuvres nationales en tête desquelles on voudrait voir le gouvernement se placer. Espérons qu’il saura du moins lui accorder les encouragemens qu’elle mérite. D’ailleurs, à de telles entreprises le public ne manque jamais. (N. du D.)


C’était pendant le siége de Dunkerque, au mois de juin 1658, quelques jours avant la sanglante bataille des dunes, qui décida du sort de cette ville importante, alors assiégée par l’armée franco-anglaise que commandait M. le maréchal de Turenne pour Louis xiv, et sa seigneurie lord Lockart pour Cromwell ; M. le marquis de Lède, M. le prince de Condé et don Juan d’Autriche défendaient la place pour le roi d’Espagne, qui la possédait depuis 1652.

Or, par une belle soirée de ce mois, un groupe assez nombreux de bourgeois et de marins se pressait sur le degré d’une modeste maison située vers cette partie de la rue de l’Église qui avoisinait la paroisse, alors si renommée par son merveilleux carillon.