Sauvageot. — Oui dà ! et si le mari est une bête, la femme deviendra-t-elle un quadrupède !
Plataristote. — Point de meilleur apprentissage qu’une mauvaise femme ; elle vous apprend à souffrir chrétiennement les injures de vos ennemis.
Sauvageot. — Recette pour les poltrons !
Plataristote. — De toutes les vertus féminines, la reine, c’est la chasteté.
Sauvageot. — Je suis bien aise de le savoir.
Plataristote. — Un mari qui ne cesse pas de satisfaire et d’irriter la concupiscence conjugale, lui donne exemple et leçon, pour qu’elle marche avec d’autres dans la même carrière.
Sauvageot. — J’attendais celle-là.
(Le philosophe se cogne la tête contre un mur.)
Plataristote. — Erreur impardonnable qui vient de tarir la source des proverbes et des sentences qui jaillissait de mon fertile front !
Sauvageot. — Mon vénérable maître, s’il vous plaisait de me confier à l’avenir tant vos devoirs conjugaux que la surveillance de vos facultés ambulatoires, je me tirerais de là, je crois, un peu mieux que vous.
Plataristote. — Je te remercie de ton dévouement parfait, etc., etc.
Pendant que la femme du philosophe le trompe, une courtisane, nommée Tullia, s’apprête à plumer un marchand siennois, dont elle rencontre la servante.
Méa. — Quelle est cette femme qui marche la tête si bien encapuchonnée ?
Tullia. — Tu ne me reconnais pas !
Méa. — C’est toi ou bien ton fantôme.
Tullia. — À la bonne heure.
Méa. — Et d’où viens-tu ? où vas-tu ? comment vas-tu ?
Tullia. — Je viens de chez un amant, je vais chez un autre, et j’en attends un troisième.
Méa. — Heureuses que vous êtes, vous autres !
Tullia. — Et toi, que fais-tu maintenant, et d’où viens-tu ?
Méa. — L’amour quand je puis, et je suis servante d’un riche joaillier de Pérouse qui demeure chez la Betta.
Tullia. — Y a-t-il long-temps qu’il est ici ?
Méa. — L’avarice qui le tient aux cheveux, l’a fait venir dans l’espoir d’y vendre ses joyaux ; il a une belle petite boursette pleine de florins tout étincelans, tout fumans, tout appétissans.