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LOUIS xiii ET RICHELIEU.

progrès dans le règne du vice. Mais les aides que vous aurez du maître des diables de Loudun seront si puissants qu’il vous sera plus aisé de faire en peu de temps un grand voyage dans le chemin de la vertu, qu’il ne vous l’a été par le passé de suivre l’exemple de Bautru[1], que je ne tiens pas pourtant si perdu que je ne croye que, s’il a été autrefois complaisant à Votre Altesse, en ses débauches, il ne soit à l’avenir capable de réparer sa faute en contribuant à votre conversion. J’ay vu ce qu’il vous a plu me mander du repos qu’il se procure pendant la messe. La loy chrestienne obligeant d’interpréter toujours en bonne part les actions qui ne sont pas déterminément mauvaises, je veux croire que, s’il est quelquefois assis en telle occasion, cela ne vient pas de l’indifférence de son esprit, mais bien de l’indisposition que la goutte donne à son malheureux corps ; si, d’autre part, ses sens sont quelquefois entièrement assoupis, je ne juge pas à la vérité que ce soit une extase ou ravissement de l’esprit élevé au-dessus des sens, mais bien plutôt un effet de sa nature terrestre et porchine, qui se repose dans son lard, lorsqu’elle est le plus éveillée. Je prie Dieu, monseigneur, qu’il retire Bautru de sa léthargie, vous confirme en la continence de votre langue, et vous donne en outre toutes celles dont Votre Altesse a besoin, et à nous les occasions de vous faire paroître que je suis et seray à jamais, etc. »


Les épitres qui suivent feront connaître le caractère et la tournure d’esprit du galant cardinal.


À MADAME DE BULLION[2].

« Je voudrois vous pouvoir témoigner plus utilement que je n’ay fait, l’affection que j’aurai toujours de vous servir. Outre que la considération de votre mérite m’y porte, les fréquentes sollicitations que monsieur de Bullion me fait de ce qui peut concerner votre contentement ne m’y convient pas peu. J’ay veu un temps

  1. Bouffon et bel esprit du temps, l’un des premiers membres de l’Académie française.
  2. Femme du surintendant des finances.