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DE LA RÉFORME COMMERCIALE.

appliquée par des hommes aussi profondément pénétrés du sentiment national de cette époque, c’est-à-dire de la haine de l’étranger, que l’étaient Louis xi et Cromwell, pouvait-elle produire autre chose qu’une mesure de restriction, de prohibition, de guerre ? Et si ce n’étaient à cet acte et à tous ceux du même genre, produits de l’ignorance et des haines de ces temps malheureux, à quels actes devrait donc s’appliquer cet aveu que n’a pu retenir M. d’Argout :

« Des faits, qu’il est facile de vérifier, prouvent que les prohibitions prononcées à diverses époques étaient l’effet des emportemens du pouvoir, des représailles ou des moyens de guerre, et qu’après la cessation des causes qui les avaient produites, on ne croyait plus possible de les révoquer, parce qu’elles avaient donné naissance à des industries nouvelles, et avaient forcé le développement des anciennes[1]. »

Si l’on examine avec attention les actes de Colbert et ceux de tous les ministres qui lui ont succédé, on les voit toujours dominés par les corporations, par les compagnies à priviléges, régler les tarifs de douanes sur les besoins et les demandes de ces corps constitués avant eux ou par eux, et à qui, en ces temps constamment obérés, ils vendaient fort cher les priviléges nouveaux qu’ils leur concédaient.

Si l’on recherche comment a été rompu le traité de 1786, ce traité aujourd’hui si peu connu, on voit que les guerres seules avec l’Angleterre y ont mis un terme, et que l’Assemblée Constituante, en un temps où le tiers-état y était puissant sans doute, où le commerce et l’industrie y auraient fait entendre leurs plaintes, si un tort réel avait été fait au pays par ce traité, n’a jamais eu à s’en occuper sous ce rapport ; elle avait une bonne occasion pour le rompre, si elle l’eût voulu ; c’était au moment où elle révisait le tarif entier des douanes ; elle ne l’a pas fait.

Et le tarif même de l’Assemblée Constituante, ce tarif qui affranchissait de tous droits à l’entrée et à la sortie les matières premières principales de la consommation et de l’industrie, ce tarif, comment est-il tombé ? C’est encore M. d’Argout, dans son Exposé de Motifs, déjà cité, qui nous l’apprendra. « La Convention, dit-il, par sa loi du 1er mars 1795, a prohibé une multitude d’articles, en haine des puissances qui faisaient la guerre à la république ? » Après la Convention, les guerres impériales nous

  1. Exposé des motifs du projet de loi sur les douanes présenté par le ministre le 3 décembre 1832. Cette argumentation de M. d’Argout avait pour but de prouver que l’administration n’avait jamais obéi à un système, mais aux nécessités du temps, et qu’aujourd’hui elle repoussait autant les principes de la prohibition, que les principes de la liberté commerciale. De l’éclectisme en matière de douanes !