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pour cela que depuis quatre ans le ministère n’ose pas appliquer à Alger[1] le régime colonial, cette portion si essentielle et si logique du système restrictif, qu’alors qu’on la répudie, on prononce la condamnation du reste ; c’est pour cela qu’un des ministres actuels, dont le langage est le plus mesuré et les convictions les plus réfléchies, s’est vu forcé, pour obtenir la suppression du système des primes sur les sucres, de faire justice enfin de cet oppressif régime des colonies[2] ; c’est pour cela que la liberté a été accordée à nos soies et qu’elles peuvent se présenter sur les marchés étrangers ; c’est pour cela que la prime à la sortie sur les sucres raffinés a été supprimée, et levée aussi la prohibition à l’entrée sur les cotons filés étrangers de haut numéro.

Un fait grave est venu donner plus d’intensité à l’opposition dont la restriction des échanges entre les nations est l’objet, parmi nous, depuis quelques années ; c’est l’exposé des motifs du projet de loi de douanes présenté, le 3 février dernier, par M. Thiers, alors ministre du commerce.

Depuis long-temps, les hommes qui recherchent de bonne foi la vérité, et qui savent aussi la part qu’un gouvernement doit faire des faits préexistans, des existences assises à l’abri même de lois mauvaises, s’étonnaient et s’effrayaient de l’imprudence croissante de l’administration dans sa dé-

    députés ; rapporteur, M. Meynard ; commissaires, MM. Tavernier, Gravier, Reynard, Teste, J. Lefèvre, de Chastelier, Cambis d’Orsan et Meynard. Ces paroles de la commission s’appliquaient particulièrement aux tarifs et prohibitions restrictifs de la production et du commerce des laines, et de l’industrie du lainage.

  1. Alger n’est pas soumis à notre tarif de douanes, ni à la double prohibition qui constitue le régime colonial. Toutes denrées, matières premières ou manufacturées y sont admises sous le paiement d’un droit de 4 pour 100 de la valeur, si elles sont françaises et importées sous pavillon français ou algérien, et de 8 pour 100, si elles sont étrangères ou importées par pavillons étrangers. Les vins et eaux-de-vie sont soumis à un droit de 15 pour 100, quel que soit le pavillon importateur ; le sel français est sujet à un droit de 3 à 4 francs par 100 kilogrammes, suivant qu’il arrive par navires français ou étrangers.
  2. Le 23 avril 1833, M. Humann s’exprimait comme il suit, à la chambre des pairs, sur le régime colonial, dans la discussion de la loi sur les sucres.

    « On a accordé aux colonies des encouragemens qui blessent la raison ; est-ce un motif pour les leur maintenir à toujours ? Y a-t-il justice à sacrifier à l’intérêt colonial la fortune de la métropole ? On vous a fait le tableau de l’avantage que la France recueille de ses colonies. Ces avantages sont contestables. Dans ma profonde conviction, les bénéfices du colon, des armateurs et du commerce ne s’élèvent pas à moitié des sacrifices que les colonies nous imposent. »