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DE LA RÉFORME COMMERCIALE.

eux pour que de grands intérêts se soient engagés ou compromis derrière les tarifs de douanes, et ces tarifs, d’ailleurs, n’ont jamais été aussi élevés que les tarifs d’Europe. Mais il y a une raison plus décisive encore de l’avènement prochain de l’Amérique du Nord à la liberté commerciale ; c’est la variété du climat, et par conséquent la diversité des besoins des populations, qui, des glaces du Maine aux sables brûlans des Florides, se sont unies sous le même gouvernement. Il y a là autant de différences de température, et par conséquent autant de différences de mœurs et d’habitudes de consommation, qu’on en peut compter du Cap Nord à Gibraltar ; aussi, lorsque viendra le jour, et infailliblement il est près de nous, où des Florides au Maine et de Washington à la Californie sera installée la liberté commerciale, comme seul moyen de maintenir l’union des diverses parties de ce vaste continent, nous aurons à faire une curieuse étude en Europe. Il faudra bien, en effet, qu’on nous démontre que cette liberté qui verse les bienfaits de la paix et de l’ordre sur cet immense territoire ne peut être acceptée par l’Europe, et en troublerait l’équilibre. Oui, soyez-en sûrs, il se trouvera des écrivains pour soutenir cette thèse. Mais se trouvera-t-il des peuples pour les écouter long-temps ?


À ces actes capitaux, et dont la tendance à l’affranchissement industriel n’est pas contestable sans doute, les partisans du système restrictif semblent, au premier coup d’œil, pouvoir opposer un autre fait, d’une signification en apparence toute contraire, et d’une importance grande aussi : l’union commerciale des états allemands. Il est certain que l’intérêt français paraît lésé par cette union, inspirée en partie, sans nul doute, par une pensée hostile à la France. Dégageons-nous cependant de cette première impression, et recherchons sans passion le véritable sens et l’avenir de cette alliance de douanes de l’Europe centrale.

On sait comment le congrès de Vienne a constitué l’Allemagne ; comment, afin de conserver à l’alliance du Nord, et en hostilité contre la France, les deux peuples les plus importans de l’Europe centrale, la Prusse et la Bavière, il a jeté à ces deux royaumes deux annexes prises entre le Rhin et nous. Sentinelles placées sur notre ancienne frontière, et pour nous disputer la frontière de nos affections populaires, la Prusse et la Bavière ont eu pour prix de cette lourde mission, les deux magnifiques territoires appelés les cercles rhénans. De ce jour, leur politique n’a pas cessé d’incliner vers le Rhin, et leur constante pensée a été, a dû être de se rapprocher de ces riches provinces, et d’y créer des intérêts prussiens et bavarois. Cette tâche ne leur était pas facile.

Séparées d’elles, la Bavière par le Wurtemberg et le grand-duché de