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tentissante, une voix à donner à son parti, et on quitte tous ces avantages pour la plus puérile des distinctions ! Si vingt pairs démissionnaires n’avaient point abandonné la chambre haute, les voix de MM. de Noailles et de Brézé resteraient-elles isolées dans les grandes discussions ? M. de Talleyrand comparait la conduite du parti démissionnaire à celle de gens qui se tueraient provisoirement dans l’espoir de ressusciter au jugement dernier.


Je ne sais si je dois vous parler de M. Dubouchage et de sa parole criarde et sans portée. M. Dubouchage est loin d’inspirer cette haute considération politique que méritent ses collègues d’opinion ; il est assis sur le siège qu’il occupe par l’hérédité ; il est neveu de ce comte Dubouchage, un moment ministre de la marine sous Louis xviii, au temps où l’on improvisait les officiers de nos escadres ; ministre, au reste, de conscience, de talens même spéciaux, mais qui gouvernait avec des souvenirs et des préjugés. Son neveu, M. le vicomte Dubouchage, n’a point été heureux dans toutes les spéculations de sa vie : son nom a souvent retenti dans les tribunaux ; il a long-temps siégé à Sainte-Pélagie, et plusieurs fois la chambre a été sollicitée de donner l’autorisation indispensable pour l’exercice de la contrainte par corps contre un pair. Ce ne sont là sans doute que des malheurs ; mais M. Dubouchage ne rachète pas ces déconsidérations par un talent réel et de grandes études : son opposition se résume en une sorte de criarderie légitimiste sur toutes choses, à l’expression d’une haine mal déguisée contre ce qui est. Or, la haine est un sentiment petit, égoïste, qu’une assemblée ne comprend pas plus que le pays ; elle trouve peu de retentissement, parce qu’elle imprime sur chaque parole le motif qui la dicte. Les antécédens de M. Dubouchage ne lui permettent pas, comme à MM. de Noailles et de Dreux-Brézé, de se faire le champion de la liberté. M. Dubouchage a vieilli à travers le ministère de M. de Villèle et l’a servi avec dévouement ; il lui devait la transmission de la pairie de son oncle : la reconnaissance alla un peu loin. Ses précédens commandaient donc certaine réserve ; ce n’est pas quand on a voté les lois les plus répressives du système de la restauration, qu’on est apte à venir parler de liberté, du suffrage électoral universel et populaire. Sous ce rapport, M. Dubouchage nuit plus à son parti qu’il ne le sert dans la pairie. Je ne crois pas que l’opinion légitimiste pure voie jamais agrandir ses forces dans la chambre des pairs. Dans une crise bien déterminée, et s’il fallait donner aide à une restauration, la chambre des pairs ne serait pas le dernier corps politique disposé à se prononcer ; alors se montreraient une foule de consciences incertaines qui marchent avec tous les pouvoirs, mais qui soutiennent d’a-