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sion du travail étranger suffit à développer le travail national, et il ne s’aperçut pas qu’en bornant la consommation française aux produits français, il paralysait l’excitation d’améliorer, et nous laisserait devancer par tous nos rivaux. Cette grande faute ne lui a pas été révélée, car l’exposition de 1806 a été la seule de l’empire. Elle fut brillante, il est vrai ; mais on eût pu craindre que les désastres des années qui précédèrent la restauration, l’ignorance des progrès que les arts mécaniques faisaient ailleurs, et les maux de l’invasion joints aux discordes civiles, ne fussent un jour près d’accabler les forces productives de l’industrie française, si le courage et le génie de la nation étaient choses qui pussent être anéanties.

Le gouvernement de la restauration, dominé par un esprit de retour vers l’ancien état politique de la France, sentait cependant la nécessité de se concilier les classes dont l’influence avait grandi dans le corps social pendant trente années de révolution. Il eut recours aux expositions des produits de l’industrie. Deux eurent lieu sous Louis xviii, la troisième sous Charles x, car, depuis Napoléon, le chef de l’état est associé à la pensée de ces grandes solennités. C’est vers lui que se dirigent les vœux, c’est de lui qu’émanent les encouragemens, les récompenses et les faveurs. Les appréciations se combinent entre le ministre dirigeant et le jury qu’il a nommé. La situation sociale, les recommandations puissantes, entrent en considération avec le mérite et l’habileté. La modestie, qui attend sauvagement que l’on aille à elle, a tort, comme c’est à peu près le cas dans toutes les choses de ce monde, et les hommes honorables qui donnent leur avis sur les concurrens font assurément de leur mieux pour ne point commettre d’injustice.

Les trois expositions de la restauration ne se rattachent plus, comme autrefois, à une commémoration publique ; elles ont été des actes politiques isolés, conseillés par M. Decazes et par M. de Villèle, pour rapprocher du trône les industriels du pays. Il fallait bien, à l’occasion, leur témoigner quelque intérêt, accorder à ceux qui se montraient dévoués, des honneurs qui eussent l’apparence de n’être pas de simples faveurs. On cherchait, dans l’urbanité du souverain, le moyen de faire quelque conquête qui prouvât que l’on avait des amis en dehors des courtisans.

L’exposition qui vient de se clore est un acte politique comme les trois expositions de la restauration. Des questions vives venaient d’être agitées à la tribune publique ; la marche du pouvoir n’avait pas toujours été en harmonie avec son origine ; la législature arrivait à son terme : aucun des moyens dont on peut disposer, n’était à négliger, s’il devait contribuer à donner quelques voix au pouvoir dans les élections annoncées. Une exposition appelle à Paris, met en relation avec l’administration les hommes