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ON NE BADINE PAS AVEC L’AMOUR.

PERDICAN.

Oh ! mon Dieu, non. Regardez donc, mon père, comme Camille est jolie !

LE BARON.

Allons, Camille, embrasse ton cousin.

CAMILLE.

Excusez-moi.

LE BARON.

Un compliment vaut un baiser ; embrasse-la, Perdican.

PERDICAN.

Si ma cousine recule quand je lui tends la main, je vous dirai à mon tour : Excusez-moi ; l’amour peut voler un baiser, mais non pas l’amitié.

CAMILLE.

L’amilié ni l’amour ne doivent recevoir que ce qu’ils peuvent rendre.

LE BARON, à maître Bridaine.

Voilà un commencement de mauvais augure ; hé ?

MAÎTRE BRIDAINE, au baron.

Trop de pudeur est sans doute un défaut ; mais le mariage lève bien des scrupules.

LE BARON, à maître Bridaine.

Je suis choqué, — blessé. — Cette réponse m’a déplu. — Excusez-moi ! Avez-vous vu qu’elle a fait mine de se signer ? — Venez ici, que je vous parle. — Cela m’est pénible au dernier point. Ce moment qui devait m’être si doux est complètement gâté. — Je suis vexé, — piqué. — Diable ! voilà qui est fort mauvais.

MAÎTRE BRIDAINE.

Dites-leur quelques mots ; les voilà qui se tournent le dos.

LE BARON.

Eh bien ! mes enfans, à quoi pensez-vous donc ? Que fais-tu là, Camille, devant cette tapisserie ?

CAMILLE, regardant un tableau.

Voilà un beau portrait, mon oncle. N’est-ce pas une grand’ tante à nous ?

LE BARON.

Oui, mon enfant, c’est ta bisaïeule, — ou du moins, — la sœur de ton bisaïeul, — car la chère dame n’a jamais concouru, — pour sa part, je crois, autrement qu’en prières, — à l’accroissement de la famille. — C’était, ma foi, une sainte femme.