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il s’est élevé des réclamations, et de là cette vive opposition contre les doctrinaires. M. Guizot, homme supérieur à tout ce qui l’entoure, passé des théories de l’histoire à la pratique des affaires, a le défaut de cette école, d’adopter tous ses principes comme des articles de foi ; il frappe, c’est avec conscience, et c’est en cela qu’il est plus dangereux, parce qu’il entre dans la condition des esprits convaincus de ne jamais s’arrêter.

L’école à principes me paraît avoir pour chef spécial M. Royer-Collard. Elle ne se laisse pas préoccuper à ce point par les nécessités et les faits, qu’elle oublie jamais certaines maximes générales d’humanité et de liberté, qui forment son code de morale ; il est dans l’esprit de M. Royer-Collard un instinct merveilleux pour deviner le point où le pouvoir et les factions doivent s’arrêter ; quand ce point est dépassé, sa voix grave s’élève et se fait entendre comme un retentissement de la voix publique effrayée de la tendance de son gouvernement ou des partis ; c’est une mission honorable : mais M. Royer-Collard s’arrête là ; il fait retentir sa voix comme un tocsin funèbre, sans oser porter remède au mal. Il est des époques où il le faut pourtant, si l’on ne veut être accusé de pusillanimité. M. Royer-Collard a voté toutes les lois d’exception, et ce n’est que dans un coin de son collége électoral qu’il a osé proclamer les lois imprescriptibles d’humanité et de gouvernement qui viennent de relever sa popularité.

Maintenant, reprenant toutes les fractions diverses de la chambre, je dirai : L’immense majorité est au ministère ; l’union du tiers-parti avec lui, quels que soient les petits manèges et les petites intrigues, est complète ; l’opposition de toutes les couleurs ne s’élèvera pas au-delà de quatre-vingts à cent membres ; mais au moins elle sera pure de toute alliance avec le tiers-parti ; elle ne dépendra plus d’une boutade de M. Dupin ; elle deviendra elle-même, sans récriminer contre le passé, en désirant un autre avenir ; elle se posera sur le terrain tout populaire de la réforme du parlement et de la réforme du budget : deux mots qui doivent formuler la politique de l’opposition, devenir le principe de toute alliance et répondre à tous les besoins du pays.

Un pair de France.