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ON NE BADINE PAS AVEC L’AMOUR.

doit, le bon dieu qu’elle a de sa mère. Son éducation, Dieu merci, est terminée, et ceux qui la verront auront la joie de respirer une glorieuse fleur de sagesse et de dévotion. Jamais il n’y a rien eu de si pur, de si ange, de si agneau et de si colombe que cette chère nonnain ; que le Seigneur Dieu du ciel la conduise. Ainsi soit-il. Rangez-vous, canaille ; il me semble que j’ai les jambes enflées.

LE CHŒUR.

Défripez-vous, honnête Pluche, et quand vous prierez Dieu, demandez de la pluie ; nos blés sont secs comme vos tibias.

DAME PLUCHE.

Voas m’avez apporté de l’eau dans une écuelle qui sent la cuisine ; donnez-moi la main pour descendre ; vous êtes des butors et des mal appris.

(Elle sort.)
LE CHŒUR.

Mettons nos habits du dimanche, et attendons que le baron nous fasse appeler. Ou je me trompe fort, ou quelque joyeuse bombance est dans l’air d’aujourd’hui.

(Ils sortent.)


Scène ii.

Le salon du baron.
Entrent le BARON, maître BRIDAINE, et maître BLAZIUS.
LE BARON.

Maître Bridaine, vous êtes mon ami ; je vous présente maître Blazius, gouverneur de mon fils. Mon fils a eu hier matin, à midi huit minutes, vingt et un ans comptés ; il est docteur à quatre boules blanches ; maître Blazius, je vous présente maître Bridaine, curé de la paroisse : c’est mon ami.

MAÎTRE BLAZIUS, saluant

À quatre boules blanches, seigneur ; littérature, botanique, droit romain, droit canon.

LE BARON.

Allez à votre chambre, cher Blazius, mon fils ne va pas tarder à paraître ; faites un peu de toilette, et revenez au coup de la cloche.

(Maître Blazius sort.)
MAÎTRE BRIDAINE.

Vous dirai-je ma pensée, monseigneur ? le gouverneur de votre fils sent le vin à pleine bouche.