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NAPOLÉON.

Le vent les mène par la bride.
L’orage avec eux emporté
De ses talons les éperonne,
De son fouet les aiguillonne.
Jamais, couché sur le côté,
Leur maître n’ouvre la paupière
Pour regarder si dans l’ornière
L’essieu n’est pas trop cahoté.
La feuille du chêne en automne
Suit son cortège impérial,
Et de loin le lion royal
Ôte de son front sa couronne.
Sous leurs voiles, près du cercueil,
Plus de cent batailles gagnées
Sortent de terre prosternées,
Comme des veuves tout en deuil.
Et mille fameuses journées,
Debout sur le bord du chemin,
Comme des sœurs abandonnées,
Chantent pour lui leur chant d’airain.
En roulant sa vague profonde
Pour voir défiler son convoi,
La mer de l’autre bout du monde
S’avance et crie : Attendez-moi

Et trois généraux ont de larmes
Au lieu de sang trempé leurs armes ;
Et le tombeau répète encor :
Est-il vrai, dites, qu’il est mort ?


iv.



Mais une musique guerrière
Qui derrière eux comptait leurs pas,
Disait ce qu’eux ne disaient pas.
Le casque agite sa crinière,
Le sabre aiguise son tranchant.
Et l’épée écoute ce chant :