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REVUE DES DEUX MONDES.

À l’étoile qui brille il dit :
— Menez mon vaisseau, belle étoile ;
Jusqu’au ciel ma vergue grandit ;
D’un souffle de géant, ma voile
Se gonfle et se remplit d’orgueil ;
Faites-moi traverser l’écueil
De ma fortune et de ma gloire.
Mes ballots rangés sur le pont,
Sont Lodi, Marengo, l’Alpont
Et cent noms encor de victoire.
Il n’est point de port assez beau
Pour y faire entrer mon vaisseau,
De grand bazar, de ville sûre,
Pour y déposer ma capture.
— Voguez ! forban, vers cet îlot,
Là-bas, là-bas, où va le flot ;
Vous trouverez dans l’herbe verte,
Sous le tronc d’un saule pleureur,
Une petite tombe ouverte,
Vous y mettrez votre empereur,
Votre empereur avec sa gloire,
Et cent noms encor de victoire. —

Une île sort du fond de l’eau
Qui porte à sa cime une tombe :
À ses pieds s’arrête un vaisseau,
Et sa grande voile retombe.


ii.



Ne pleurez pas, mes généraux ;
De mon lit ouvrez les rideaux.
Venez, pendant que je respire,
Je veux faire mon testament.
Qu’il soit rempli sans changement,
Selon ce que je vais vous dire :
Je lègue à l’ombre mon empire,
À mes soldats leurs cheveux blancs